L'honorable Danielle Côté

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QUEL A ÉTÉ VOTRE CHEMINEMENT DANS LE MONDE DU DROIT ET DE LA MAGISTRATURE?

J’ai toujours voulu ĂŞtre avocate bien qu’il n’y ait eu aucun juriste dans ma famille : ma mère me suggĂ©rait mĂŞme un cours de secrĂ©tariat parce que nous n’Ă©tions pas très fortunĂ©s.

Mais j’y tenais et j’ai persĂ©vĂ©rĂ©. J’avoue que mes premiers pas Ă  la facultĂ© de droit ont Ă©tĂ© difficiles : venant d’une rĂ©gion Ă©loignĂ©e, il s’agissait de la première fois oĂą je quittais le domicile familial. 

J’avais mĂŞme tenu pour acquis que mon inscription Ă  la facultĂ© de droit m’assurait une place en rĂ©sidence, et ce, sans nĂ©cessitĂ© de rĂ©servation.

ArrivĂ©e le dimanche soir, alors que les cours dĂ©butaient le lundi matin, j’ai dĂ» me dĂ©brouiller pour me trouver un logement qui, compte tenu de la date, Ă©tait très dispendieux.

Je me rappelle encore ma première journĂ©e :  je quittais le Cegep et je suis arrivĂ©e Ă  l’UniversitĂ© de la mĂŞme manière, avec un stylo et un calepin pour prendre des notes.  Quelle ne fut pas ma surprise de constater que tout le monde Ă©tait en complet/cravate et avait dĂ©jĂ  achetĂ© le Code civil, le Code de procĂ©dure civile et le Code criminel.

J’ai quittĂ© Ă  la pause en me questionnant sur mon choix de carrière.  J’y suis retournĂ© le lendemain et j’ai finalement terminĂ© ma licence.

Ă€ la fin de mon cours, je savais que le droit criminel Ă©tait ce qui m’intĂ©ressait et, plus particulièrement, le rĂ´le de procureur de la Couronne.  Malheureusement aucun stage n’Ă©tait disponible Ă  ce moment.

J’ai donc commencĂ© ma carrière Ă  l’aide juridique pour, par la suite, me joindre Ă  un bureau de pratique privĂ©e oĂą j’ai principalement Ĺ“uvrĂ© en droit commercial et civil.

Puis, mon rĂŞve s’est rĂ©alisĂ© et je suis devenue procureure de la Couronne au provincial et, par la suite, je me suis jointe Ă  l’Ă©quipe de la Couronne fĂ©dĂ©rale Ă  MontrĂ©al.

Parallèlement, j’ai enseignĂ© dans diffĂ©rentes facultĂ©s de droit ainsi qu’Ă  l’École de formation professionnelle du Barreau du QuĂ©bec et j’ai supervisĂ© des stagiaires pendant plusieurs annĂ©es.

En 1994, Ă  l’âge de 38 ans, j’ai Ă©tĂ© nommĂ©e juge Ă  la chambre criminelle et pĂ©nale et Ă  la chambre civile de la Cour du QuĂ©bec, avec rĂ©sidence Ă  Sherbrooke.

Dès ma nomination, j’ai continuĂ© Ă  enseigner, mais dans le cadre de la formation permanente des juges de la Cour du QuĂ©bec et Ă  titre de confĂ©rencière lors de formations organisĂ©es par l’Institut National de la Magistrature.

Jusqu’Ă  ma nomination, en 2011,  comme juge en chef adjointe Ă  la chambre criminelle et pĂ©nale, je siĂ©geais Ă  parts Ă©gales en matières civile et criminelle.

J’Ă©tais membre de la division administrative et d’appel qui siège en appel de plusieurs dĂ©cisions des Tribunaux administratifs de compĂ©tence provinciale et membre du Tribunal des professions qui siège en appel des dĂ©cisions disciplinaires des ordres professionnels. 

J’ai terminĂ© mon mandat de juge en chef adjointe en 2018 et, bien que je sois admissible Ă  la retraite, je suis redevenue juge puĂ®nĂ© parce que j’adore ĂŞtre dans une salle de cour, ce que je n’avais presque pas fait durant mon mandat de juge en chef adjointe. Je suis juge depuis 1994, et il n’y a pas une journĂ©e oĂą je ne me rĂ©pète pas Ă  quel point je suis privilĂ©giĂ©e de pouvoir exercer cette charge.

QUELS CONSEILS DONNERIEZ-VOUS AUX JURISTES QUI COMPARAISSENT DEVANT VOUS?

Je crois qu’un bon avocat connaĂ®t Ă  fond son dossier, incluant ses forces et ses faiblesses, est respectueux envers tous les acteurs du système judiciaire et, surtout, sait faire preuve de jugement.

Rien n’est plus agrĂ©able pour un juge qu’un avocat qui, après avoir entendu la cause, est capable d’admettre que son dossier n’est pas aussi bon qu’il le croyait au dĂ©but.

Souvent, la preuve ne se dĂ©roule pas tout Ă  fait comme prĂ©vu et il faut avoir la capacitĂ© de l’admettre et ne pas faire perdre de temps Ă  la Cour.  Il faut aussi ĂŞtre capable de contrĂ´ler son client et ne pas accepter tout ce qu’il demande lorsque ces demandes ne sont pas raisonnables.

Un bon avocat est aussi quelqu’un qui respecte tous les intervenants du système de justice et qui a le souci de faire partie des solutions dans le cadre de la recherche du meilleur rĂ©sultat pour les justiciables.