L’honorable Theresa McDonald

Quel a été votre cheminement dans le monde du droit et dans la magistrature?

Je reconnais que je vis et que je travaille sur le territoire du TraitĂ© No 5, et que ces terres sont le territoire traditionnel des Cris, Inninnowuks, DĂ©nĂ©s, Saulteaux, Oji-Cris, AnishinabĂ©s et MĂ©tis.

J’ai Ă©tĂ© nommĂ©e Ă  la Cour provinciale du Manitoba en 2018. Je tranche des dossiers en matière de droit pĂ©nal, de droit des jeunes, de protection de la jeunesse et de droit de la famille. Au fil de 38 ans, j’ai exercĂ© dans un cabinet privĂ©, j’ai Ă©tĂ© avocate salariĂ©e auprès de l’aide juridique, avocate-superviseure, directrice rĂ©gionale pour Aide juridique Manitoba (rĂ©gions), j’ai travaillĂ© pour un Conseil tribal d’une Première nation, et pour plusieurs Premières nations. Le principe qui me guide tout au long de la vie a toujours Ă©tĂ© la protection des personnes vulnĂ©rables. Qu’est-ce qui m’y a conduite? Un accident de naissance peut-ĂŞtre. Je n’ai qu’une main et cela s’est avĂ©rĂ© ĂŞtre ma force. Cela m’a guidĂ©e dans mon choix de carrière. J’ai vĂ©cu des rappels quotidiens que ceux et celles d’entre nous qui sont diffĂ©rents ou parlent diffĂ©remment de la plupart des autres dans notre sociĂ©tĂ© sont très souvent traitĂ©s diffĂ©remment. Alors que personne ne peut vĂ©ritablement vivre ce que les autres ont vĂ©cu, j’espère avoir appris Ă  faire preuve d’empathie et Ă  respecter toute personne pour ce qu’elle est en tant que personne.

J’ai eu le privilège de servir des organisations communautaires, y compris The Pas Committee for Women in Crisis qui a Ă©tabli l’un des premiers refuges rĂ©sidentiels pour les femmes et les enfants dans le nord du Manitoba. J’ai eu l’honneur de siĂ©ger Ă  des conseils d’administration de Centres d’amitiĂ© locaux, de comparaĂ®tre en qualitĂ© d’avocate reprĂ©sentant une Première nation devant la Commission Kimelman, d’ĂŞtre co-auteure du premier manuel juridique pour un organisme d’aide Ă  l’enfance autochtone, de travailler avec une Première nation pour Ă©tablir dans une rĂ©serve un foyer d’accueil conçu et exploitĂ© par des Autochtones, de siĂ©ger Ă  des conseils d’administration d’organisations axĂ©es sur les services de garderie et d’assistance pour les jeunes familles monoparentales, et de siĂ©ger au conseil d’administration d’une association qui aidait les personnes ayant des capacitĂ©s physiques diffĂ©rentes.

Du point de vue professionnel, j’ai Ă©tĂ© conseillère reprĂ©sentant le Nord auprès du barreau du Manitoba, prĂ©sidente de la Northern Bar Association et reprĂ©sentante de la rĂ©gion du Nord auprès de l’Association du Barreau du Manitoba. C’est avec plaisir que j’ai Ă©tĂ© maĂ®tre de stage pour d’innombrables Ă©tudiants et Ă©tudiantes et que j’ai travaillĂ© avec des juristes, membres du personnel de soutien et comitĂ©s de juges et autres acteurs du système judiciaire. Plusieurs juges remarquables de la Cour provinciale m’ont beaucoup appris. Plus particulièrement aux cĂ´tĂ©s de feu monsieur le juge Jack Drapack, que nous appelions tous avec affection « Gentleman Jack ». Il Ă©tait et restera mon « hĂ©ros parmi les juges ». C’Ă©tait un homme du peuple, qui avait reçu le don extraordinaire de comprendre le comportement humain. 

Quelle expérience de votre carrière juridique vous a le mieux préparé à votre travail au sein de la magistrature?

Je reconnais que je vis et que je travaille sur le territoire du TraitĂ© No 5, et que ces terres sont le territoire traditionnel des Cris, Inninnowuks, DĂ©nĂ©s, Saulteaux, Oji-Cris, AnishinabĂ©s et MĂ©tis.

J’ai eu le privilège de travailler avec un important leader autochtone dans un cabinet juridique privĂ© oĂą j’ai dĂ©couvert la notion d’autonomie gouvernementale, l’obligation de consulter, et qui m’a donnĂ© l’occasion de travailler avec des chefs de file et des communautĂ©s autochtones. Mon travail ultĂ©rieur au sein du conseil tribal d’une Première nation m’a armĂ©e avec une certaine dose de compĂ©tence culturelle et m’a permis de travailler sur des projets communautaires aux cĂ´tĂ©s des intervenants. Mes trente-deux ans de pratique au sein d’Aide juridique Manitoba m’ont enseignĂ© le droit pĂ©nal, et le droit de la protection de la jeunesse et de l’enfance. La vie dans deux communautĂ©s du Nord m’a rĂ©vĂ©lĂ© les difficultĂ©s auxquelles font face tous les gens du Nord et les possibilitĂ©s qui s’ouvrent Ă  eux. J’ai appris aux cĂ´tĂ©s d’aĂ®nĂ©s des Premières Nations, dans les villages et les villes et au contact d’un peuple rĂ©silient et dĂ©terminĂ© qui a fait face Ă  tant de difficultĂ©s sans perdre sa tĂ©nacitĂ©. J’ai exercĂ© dans plus de 24 communautĂ©s du nord du Manitoba, j’y ai Ă©tabli de solides amitiĂ©s et je suis devenue une « habitante du Nord », qui partage un lien inaltĂ©rable avec toutes les personnes qui vivent dans le Nord. Ce lien et ce respect m’ont aidĂ©e Ă  ne jamais oublier que ce que je fais en tant que juge a des rĂ©percussions sur de vraies personnes qui vivent des vies bien rĂ©elles.

Et surtout, j’ai appris auprès de feue ma sĹ“ur, Ella Andrews, une femme remarquable et sage qui a exercĂ© sa profession de travailleuse sociale dans le Nord pendant presque 20 ans. Elle m’a appris l’importance de la gentillesse et de la compassion.