Quelles sont les « personnes liées » aux fins douanières?

  • 04 juillet 2017
  • Cyndee Todgham Cherniak

Tout importateur veut savoir combien l’importation de marchandises au Canada va lui coûter. Pour répondre à cette question, il doit connaître la classification tarifaire SH de la marchandise importée au Canada, l’origine de la marchandise, les droits de douane qui lui sont applicables et la valeur de la marchandise importée. Les PME, quelles qu’elles soient, veulent connaître le coût de la réalisation d’importations. Les sociétés multinationales veulent savoir la réponse à cette question pour établir une stratégie internationale comportant des chaînes d’approvisionnement qui chevauchent les frontières.

Lorsque l’on envisage l’évaluation des marchandises devant être importées au Canada, l’une des questions les plus importantes est de savoir si l’importateur a un lien avec l’exportateur, car le service des douanes déterminera la règle d’évaluation applicable aux marchandises importées en fonction de ce lien, ce qui pourrait avoir une incidence sur le prix des marchandises. L’Agence des services frontaliers du Canada tient pour acquis que les parties liées échangent des rabais « entre sociétés » ou « Ã  titre de membre de la famille » qui se solderont par le paiement de droits de douane inférieurs (qui constituent un coût ne pouvant être recouvré). En d’autres termes, elle présume que le prix des marchandises ne correspond pas au « prix du marché » mais à un prix sous-estimé ou « influencé ».

Dans le paragraphe 45(3) de la Loi sur les douanes, le concept de « personne liée » est défini comme suit :

« Pour l’application des articles 46 à 55 [de la Loi sur les douanes], sont liées entre elles les personnes suivantes :

  1. les personnes physiques liées par le sang, le mariage, une union de fait ou l’adoption au sens du paragraphe 251(6) de la Loi de l’impôt sur le revenu;
  2. le dirigeant ou l’administrateur et celui qui est dirigé ou administré;
  3. les dirigeants ou administrateurs communs de deux personnes morales, associations, sociétés de personnes ou autres organismes;
  4. les associés;
  5. l’employeur et son employé;
  6. les personnes qui, directement ou indirectement, contrôlent la même personne ou sont contrôlées par elle;
  7. deux personnes dont l’une contrôle l’autre directement ou indirectement;
  8. plusieurs personnes dont une même personne possède, détient ou contrôle directement ou indirectement au moins cinq pour cent des actions ou parts émises et assorties du droit de vote;
  9. deux personnes dont l’une possède, détient ou contrôle directement ou indirectement au moins cinq pour cent des actions ou parts émises et assorties du droit de vote de l’autre. »

Il est par conséquent fondamental d’examiner le lien entre la personne identifiée comme l’importateur et celle qui exporte afin de savoir si elles sont liées. Si vous faites erreur (ou tenez pour acquis que la méthode de la valeur transactionnelle est applicable), c’est à cette étape qu’une nouvelle évaluation ayant des conséquences importantes (impliquant également des frais juridiques considérables) peut avoir lieu.

Lorsque les sociétés ont des raisons sociales différentes, le courtier en douane peut oublier de se renseigner sur le lien entre l’importateur et l’exportateur. Il est fréquent que les renseignements concernant les actionnaires et les propriétaires de sociétés fermées ne soient pas de notoriété publique. Même les sociétés ouvertes n’identifient pas nécessairement tous leurs dirigeants.

Les problèmes surgissent souvent lorsqu’une société étrangère constitue une filiale en personne morale au Canada. La société mère souhaite conserver le contrôle de sa filiale et les administrateurs de la société étrangère sont aussi administrateurs de la filiale canadienne. Les actionnaires étrangers ne souhaitent pas remettre le contrôle entre les mains d’une personne canadienne qu’ils ne connaissent pas parfaitement. Dans ce cas, la société étrangère et la filiale canadienne seront liées aux fins douanières et cela a des incidences sur la méthode d’évaluation pouvant être utilisée.

Pour obtenir de plus amples renseignements au sujet de la définition de l’expression « personnes liées », veuillez lire le Mémorandum D13-3-2 intitulé Personnes liées et le Mémorandum D13-4-5 intitulé Méthode de la valeur transactionnelle en ce qui concerne les personnes liées.

Les transactions entre parties liées constituent-elles une infraction?

En bref : non. Cependant, l’ASFC pourrait examiner avec la plus grande minutie les transactions entre personnes liées afin de s’assurer que le gouvernement du Canada perçoit les droits de douane auxquels il a droit.

Est-il interdit aux parties liées d’utiliser la valeur transactionnelle?

À première vue, non, mais si l’on examine la question de plus près, la réponse est « peut-être ». Si la relation a influencé le prix payé pour les marchandises importées, l’utilisation de la valeur transactionnelle doit être exclue au profit de l’une des cinq autres méthodes d’évaluation :

  • méthode de la valeur transactionnelle de marchandises identiques,
  • méthode de la valeur transactionnelle de marchandises semblables,
  • méthode de la valeur de référence,
  • méthode de la valeur reconstituée,
  • dernière méthode d'appréciation.

Les méthodes d’évaluation sont appliquées par ordre hiérarchique, c’est-à-dire qu’un importateur doit d’abord se demander si la méthode de la valeur transactionnelle est applicable. Si les marchandises peuvent être évaluées au moyen de cette méthode, aucune autre méthode ne peut être utilisée. Cependant, si elle ne peut l’être, l’importateur est tenu de déterminer si la méthode de la valeur transactionnelle de marchandises identiques peut être utilisée. Si c’est le cas (parce qu’il vend les mêmes marchandises à une autre personne au Canada qui n’a aucun lien avec l’exportateur), la méthode de la valeur transactionnelle de marchandises identiques doit être employée. Si elle ne peut l’être, l’importateur est tenu de déterminer si la méthode de la valeur transactionnelle de marchandises semblables peut être appliquée. Si elle peut l’être (parce qu’il vend des marchandises similaires, mais pas à tous les égards, à une partie avec laquelle il n’a aucun lien au Canada), alors il est tenu d’utiliser cette méthode. Il doit procéder de la sorte pour toutes les méthodes. La dernière méthode d’évaluation autorise l’importateur à se fonder sur une valeur tirée d’une application imparfaite des méthodes précédentes. L’approche adoptée doit être raisonnable.

Cyndee Todgham Cherniak, Lexsage Professional Corporation