Conférence de l’ABC sur le droit administratif, et le droit du travail et de l’emploi

  • 02 janvier 2018
  • Ronni Nordal

Chaque année, on se demande si la Conférence de l’ABC sur le droit administratif, et le droit du travail et de l’emploi va répondre aux attentes créées par la superbe conférence de l’année précédente. Sans aucun doute, celle de 2017 qui a eu lieu à Ottawa en novembre, y a répondu, et les a même dépassées.

David Phillip Jones, c.r., a ouvert la conférence avec la très attendue séance intitulée « Revue de l’année en droit administratif ». Selon l’un de ses principaux messages, la détermination de la norme de contrôle est un moyen pour atteindre une fin et n’est pas en soi un élément déterminant. David Phillip Jones a encouragé les personnes présentes à ne pas oublier qu’en cas de présomption réfutable que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable, il faut se demander si la norme de la décision raisonnable est bien, en fait, la norme appropriée. Il nous a en outre rappelé que si l’entité qui effectue le contrôle conclut qu’il n’existe qu’une seule « interprétation ou application raisonnable », elle a utilisé une norme de la décision correcte et non la norme de la décision raisonnable.

Enfin, Me Jones a mis toutes les personnes présentes au défi de se demander comment il peut être équitable et raisonnable que plusieurs interprétations du même document, par exemple un contrat type, soient confirmées sur la base de la norme de contrôle de la décision raisonnable. Il soutient que face à des contrats types, les mêmes termes devraient avoir la même signification sans égard au fait que la personne qui tranche se trouve à Calgary, Grand Prairie ou Medicine Hat.

Dans le cadre de la séance en petit groupe intitulée « Le contrôle judiciaire des mesures administratives »,

  • Jan Brongers a expliqué la jurisprudence sur la justiciabilité en nous présentant deux affaires auxquelles il a pris part : Black v Chrétien et Alani c. Canada (Premier ministre).
  • Lorne Waldman a présenté un article très complet sur le contrôle judiciaire de l’exercice de la prérogative de la couronne.
  • La mesure dans laquelle les tribunaux, au moyen du contrôle judiciaire des mesures administratives, comblent une brèche au niveau de la responsabilisation que ne traite pas le système politique ou constitutionnel actuel faisait partie des points discutés.

Dans le cadre de la séance en petit groupe intitulée « Les effectifs vieillissants : questions connexes à l’adaptation et aux avantages sociaux »,

  • Laura Watts et Paulette Guitard, Ph. D., ont informé les personnes participant à la séance sur les conséquences naturelles et normales du vieillissement par opposition aux changements pathologiques qui constituent des handicaps. Elles leur ont rappelé qu’il est plus important de centrer notre attention sur les capacités fonctionnelles plutôt que sur l’âge. Certains mythes ont été démentis, y compris celui qui veut que notre effectif vieillit à vue d’œil. En réalité, il ne vieillit pas plus rapidement qu’avant, le temps s’écoule toujours au même rythme, la question est plutôt celle de la pénurie de jeunes pour occuper les emplois.
  • Adrian Ishak nous a présenté le droit de l’obligation d’accommodement et de l’interdiction de discriminer au motif de l’âge; nous rappelant fermement que la gestion du rendement doit être appliquée uniformément à tous les employés, sans égard à leur âge.
  • Level Chan a clos la discussion, à laquelle participaient également des membres de la Section du droit des régimes de retraite de l’ABC, en nous rappelant que les régimes de retraite et les avantages sociaux sont des aberrations en ce que les régimes de bonne foi autorisent la discrimination fondée sur l’âge.

La Conférence de l’ABC sur le droit administratif, et le droit du travail et de l’emploi ne serait pas ce qu’elle a toujours été sans le privilège d’une discussion détendue avec une juge de la Cour suprême du Canada. Pierre Moreau a offert une entrevue intéressante et personnelle avec madame la juge Suzanne Cote qui a parlé de son expérience tant en qualité d’avocate en exercice que de juge de la Cour suprême. Il ne fait aucun doute qu’elle doit être l’une des rares personnes à avoir investi dans une société de personnes juridique pendant son stage.

Dans le cadre de la séance en petit groupe proposée l’après-midi intitulée « Droit des peuples autochtones dans le contexte de décisions administratives et réglementaires »,

  • Robert Janes, c.r. et Sara Mainville se sont penchés sur la signification des récents arrêts rendus par la Cour suprême du Canada sur la façon dont les droits des peuples autochtones peuvent, et devraient, être pris en compte dans les processus de prise de décisions administratives et réglementaires, et les moyens d’incorporer dans ces processus des éléments de la tradition juridique autochtone.

Dans le cadre de la séance en petit groupe intitulée « Le point sur l’évolution du droit du travail et de l’emploi pendant l’année écoulée »,

  • Thomas Gorsky et Ray Larkin, c.r. ont fait traverser le pays de part en part aux personnes présentes, ne leur épargnant ni les moments les plus brillants ni ceux qu’on préfèrerait oublier, et leur ont rappelé que plus certaines choses changent, plus d’autres restent les mêmes, et que l’exercice du droit du travail et de l’emploi demeure exigeante, fascinante et trépidante.

2017 marquant le 35e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés, le premier jour de la conférence a pris fin avec une séance plénière axée, de façon tout à fait appropriée, sur la Charte et ce que l’avenir réserve au droit administratif et au droit du travail et de l’emploi.

Graeme Mitchell, c.r., et Howard Kislowicz, Ph.D, ont non seulement brièvement rappelé les antécédents de la nouvelle trilogie du travail de 2015, soit la capacité des tribunaux administratifs d’envisager et d’appliquer la Charte et l’application correcte de ce texte, mais ont également offert leur propre point de vue sur les domaines dans lesquels les parties pourraient avoir recours à la Charte à l’avenir et les questions émergentes à surveiller.

Le groupe de discussion du samedi matin axé sur « La déontologie et le professionnalisme » était, malgré l’heure matinale, fin prêt pour solliciter la participation des personnes présentes à propos de la nature de la « civilité » et de la ligne de démarcation entre la représentation zélée et l’inconduite professionnelle. Le groupe de discussion s’est également penché sur la situation particulière et souvent épineuse causée par les plaideurs non représentés. Kim Turner, c.r., et David Wright se sont exprimés à cœur ouvert avec humour et ont amené tout un chacun à s’interroger sur ses propres pratiques et points de vue.

Enfin, et cela n’en diminue aucunement l’importance, la conférence a pris fin avec la « Perspective de la magistrature ». Le groupe de discussion était composé des juges suivants :

  • l’honorable M. O’Bonsawin, Cour supérieure de justice de l’Ontario
  • l’honorable M. Savard, Cour d’appel du Québec
  • l’honorable M. Gleason, Cour d’appel fédérale
  • l’honorable S.H. Smallwood, Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest

Les personnes présentes ont eu le privilège d’écouter les récits personnels des membres du groupe de discussion, y compris leurs points de vue sur la question de savoir comment le fait d’être femme, et dans le cas de deux d’entre elles, Autochtone, influe sur la façon dont elles tranchent ou sur la composition du tribunal qu’elles président, ou sur les deux.

Ronni Nordal est avocate dans le cabinet Nordal Leblanc Law Office