Évaluer correctement le risque pour la sécurité

  • 27 septembre 2022

Dans une lettre au ministre de la SĂ©curitĂ© publique Marco Mendicino (lettre disponible uniquement en anglais; les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions), la Section du droit pĂ©nal de l’Association du Barreau canadien et son ComitĂ© sur l’emprisonnement et la libĂ©ration proposent de modifier l’article 18 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en libertĂ© sous condition pour le rendre moins discriminatoire.

L’article 18 permet d’attribuer une cote de sĂ©curitĂ© Ă  un dĂ©tenu : sĂ©curitĂ© maximale, moyenne ou minimale – ce qu’on appelle la cote « d’adaptation Ă  l’Ă©tablissement » d’une personne. Or, l’un des critères sur lesquels repose cette cote de sĂ©curitĂ©, le « degrĂ© de surveillance et de contrĂ´le » requis par la personne incarcĂ©rĂ©e, est très problĂ©matique.

Comme l’indique la lettre, de nombreux membres de la section considèrent que ce critère est appliquĂ© « d’une manière discriminatoire qui fait que les Autochtones et les personnes souffrant de troubles mentaux reçoivent des cotes de sĂ©curitĂ© plus Ă©levĂ©es, quel que soit le risque qu’ils prĂ©sentent pour les autres ».

La section croit que le concept d’adaptation Ă  l’Ă©tablissement « recouvre en rĂ©alitĂ© la situation de personnes qui ont des besoins plus importants en matière de santĂ© mentale et de guĂ©rison adaptĂ©e Ă  leur culture », alors que de tels services ne sont pas disponibles dans les environnements Ă  sĂ©curitĂ© maximale. Les dĂ©tenus qui se trouvent dans ces environnements courent par ailleurs un risque Ă©levĂ© qu’un traumatisme prĂ©existant soit aggravĂ© par le recours frĂ©quent Ă  l’isolement et Ă  la violence. « Des personnes peuvent se retrouver piĂ©gĂ©es dans des niveaux de sĂ©curitĂ© plus Ă©levĂ©s lorsque les programmes ne sont pas disponibles ou ne rĂ©pondent pas Ă  leurs besoins », Ă©crit la section.

Au lieu de laisser les dĂ©tenus qui ont besoin d’un soutien en santĂ© mentale ou de services de guĂ©rison adaptĂ©s Ă  leur culture dans un environnement Ă  sĂ©curitĂ© maximale, la section recommande de les placer « dans un environnement qui rĂ©pondra Ă  leurs besoins et rĂ©duira en rĂ©alitĂ© leur risque pour la sĂ©curitĂ© ».

Cette recommandation s’applique en particulier aux dĂ©tenus autochtones. « La surreprĂ©sentation des Autochtones dans les milieux carcĂ©raux fait suite Ă  plus d’un siècle de frĂ©quentation des pensionnats indiens », rappelle la lettre de l’ABC. Il n’est pas surprenant que les Autochtones aient des cotes Ă©levĂ©es d’adaptation Ă  l’Ă©tablissement, poursuit la lettre, « puisque leur emprisonnement par le Canada est une extension de la politique gĂ©nocidaire des pensionnats ». Non seulement les milieux carcĂ©raux ne sont pas sĂ»rs sur le plan culturel, mais ils perpĂ©tuent la violence sans rien faire pour favoriser la guĂ©rison.

Au lieu de se baser sur le degrĂ© de surveillance et de contrĂ´le requis par un dĂ©tenu pour Ă©tablir son degrĂ© d’adaptation Ă  l’Ă©tablissement, la section propose que la cote de sĂ©curitĂ© soit fondĂ©e sur le risque que le dĂ©tenu prĂ©sente pour les autres.