Contenir la planification fiscale abusive

  • 31 mai 2022

Le gouvernement du Canada s’est engagĂ©, dans ses discours sur le budget, Ă  rendre le rĂ©gime fiscal Ă©quitable pour tous. L’un des moyens Ă  sa disposition pour atteindre cet objectif est de dĂ©couvrir les stratagèmes de planification fiscale abusive. L’Agence du revenu du Canada distingue la planification fiscale abusive de la planification fiscale lĂ©gitime en la caractĂ©risant comme un moyen de contourner l’intention du lĂ©gislateur. Dans un mĂ©moire (disponible uniquement en anglais; les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions) transmis au ministère des Finances, le ComitĂ© mixte sur la fiscalitĂ© de l’ABC et de CPA Canada commente les propositions relatives aux opĂ©rations Ă  dĂ©clarer et aux opĂ©rations Ă  signaler contenues dans l’avant-projet de loi visant Ă  freiner la planification fiscale abusive.

Comme le gouvernement fĂ©dĂ©ral l’a notĂ© dans son budget de 2021, « le manque de renseignements exhaustifs et pertinents, transmis en temps opportun, sur les stratĂ©gies de planification fiscale Ă  caractère agressif reprĂ©sente l’une des principales difficultĂ©s rencontrĂ©es par les autoritĂ©s fiscales Ă  travers le monde ». C’est pourquoi il cherche Ă  crĂ©er un système de dĂ©claration qui accĂ©lĂ©rerait la vitesse Ă  laquelle l’ARC reçoit les renseignements sur la planification fiscale abusive.

Le ComitĂ© mixte note que ce système doit parvenir Ă  un juste Ă©quilibre : « Si trop d’opĂ©rations, et en particulier des opĂ©rations qui ne relèvent pas de la planification fiscale agressive, sont assujetties aux règles, cela augmentera le fardeau administratif et les frais de l’ARC et des contribuables sans fournir de prĂ©cieux renseignements supplĂ©mentaires Ă  l’ARC. »

Une autre prĂ©occupation importante est de s’assurer que le système de dĂ©claration ne prive pas les contribuables et leurs conseillers de la clartĂ© et de la certitude dont ils ont besoin relativement aux obligations fiscales et dĂ©claratives : « Si les obligations dĂ©claratives ne sont pas claires, cela peut entraĂ®ner une surdĂ©claration – c’est-Ă -dire que des dĂ©clarations de renseignements seront dĂ©posĂ©es pour la planification fiscale de routine et d’autres opĂ©rations pour lesquelles des dĂ©clarations supplĂ©mentaires ne seraient pas utiles. »

De l’avis du ComitĂ© mixte, les obligations dĂ©claratives « devraient ĂŞtre limitĂ©es aux informations qui justifient un court dĂ©lai, c’est-Ă -dire les informations qui ne peuvent pas attendre le dĂ©pĂ´t d’une dĂ©claration de revenus ou autre ».

La lettre présente ensuite le point de vue du Comité mixte sur les règles détaillées applicables aux opérations à déclarer et à signaler.

Obligation de déclaration pour les fiducies

Dans un mĂ©moire sĂ©parĂ© (disponible uniquement en anglais), le ComitĂ© mixte convient que la transparence financière est un enjeu important et renvoie Finances Canada Ă  un autre mĂ©moire (disponible uniquement en anglais) qu’il a prĂ©sentĂ© en 2018 sur les obligations de dĂ©pĂ´t et de dĂ©claration pour certaines fiducies. Il s’inquiète aujourd’hui de l’approche proposĂ©e dans le projet de loi pour obtenir des renseignements sur la propriĂ©tĂ© effective des ententes de fiducie nue : « Nous pensons qu’aux fins de la dĂ©claration de l’impĂ´t sur le revenu, la meilleure approche consiste Ă  demander au propriĂ©taire bĂ©nĂ©ficiaire, et non au fiduciaire, de dĂ©clarer les rĂ©sultats fiscaux liĂ©s Ă  la propriĂ©tĂ©. »

En ce qui concerne les fiducies nues, qui sont souvent utilisĂ©es au Canada (notamment dans l’immobilier, pour dĂ©tenir un titre foncier lorsqu’un propriĂ©taire bĂ©nĂ©ficiaire ne peut pas ĂŞtre le propriĂ©taire inscrit), le ComitĂ© mixte est d’avis que le dĂ©pĂ´t Ă  la fois d’une dĂ©claration des revenus de la fiducie et d’une dĂ©claration de renseignements avec dĂ©claration connexe sur le fiduciaire et le constituant ou le bĂ©nĂ©ficiaire est une mesure qui rate la cible. Cela ne « fournira aucune information importante concernant la propriĂ©tĂ© dĂ©tenue en fiducie. Cela signalera simplement l’existence d’un tel arrangement », indique la lettre, avant de faire des recommandations dĂ©taillĂ©es sur la façon d’obtenir plus efficacement des renseignements sur la propriĂ©tĂ© effective.

Évitement des dettes fiscales

Dans un autre mĂ©moire encore (disponible uniquement en anglais), le ComitĂ© mixte offre des suggestions sur le concept d’Ă©vitement de dettes fiscales, introduit dans le budget de 2021. Il s’agit ici d’« opĂ©rations complexes qui tentent de contourner la règle sur l’Ă©vitement de dettes fiscales », selon le texte du projet de loi.

Le ComitĂ© mixte soutient les objectifs du projet de loi, mais craint que les propositions puissent ĂŞtre interprĂ©tĂ©es comme allant bien au-delĂ  des situations flagrantes d’Ă©vitement fiscal. Le test d’objet, en particulier, devrait ĂŞtre « reformulĂ© comme un test “de l’un des objectifs principaux” ». Une telle approche rĂ©pondrait mieux Ă  l’objectif lĂ©gislatif d’empĂŞcher les plans ou stratagèmes complexes conçus pour contourner l’article 160 de la Loi de l’impĂ´t sur le revenu.