Descendre de l’omnibus

  • 27 janvier 2016

Le premier discours du Trône du nouveau gouvernement libéral du Canada était bref et sans détours, contenant peu de surprises pour toute personne ayant suivi les 11 semaines de la campagne électorale.

La partie intitulĂ©e Un gouvernement ouvert et transparent contenait un Ă©lĂ©ment apprĂ©ciable sous forme de dĂ©claration selon laquelle « il n’aura pas recours Ă  des mĂ©canismes tels que  [...] les projets de loi omnibus pour Ă©viter les examens minutieux ».

Au cours des dernières annĂ©es, nombreux ont Ă©tĂ© les mĂ©moires adressĂ©s au gouvernement par l’ABC qui exprimaient son malaise devant la pratique d’insĂ©rer des clauses controversĂ©es dans des projets de loi omnibus puis d’en limiter la discussion.

En 2011, la Section du droit pĂ©nal, avec des apports de la Section du droit de l’immigration et la Section du litige civil, a dĂ©clarĂ© dans son mĂ©moire sur le projet de loi C-10, la Loi sur la sĂ©curitĂ© des rues et des communautĂ©s :

La Section du droit pĂ©nal de l’ABC est d’avis qu’il est inappropriĂ© et contraire Ă  l’esprit du processus dĂ©mocratique du Canada de regrouper en un seul projet de loi omnibus plusieurs initiatives en matière de justice pĂ©nale qui revĂŞtent une importance critique, mais qui sont entièrement distinctes. Certaines de ces initiatives n’ont encore fait l’objet d’aucune Ă©tude en comitĂ© parlementaire, mais contiennent des changements de fond dans la façon dont le Canada aborde le droit pĂ©nal et le traitement des dĂ©linquants. MĂŞme sans le dĂ©lai arbitraire de 100 jours fixĂ© pour l’adoption, il est irrĂ©aliste dans le cadre d’un vaste projet de loi de s’attendre Ă  ce que les propositions qui n’ont pas encore Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©es bĂ©nĂ©ficient de l’attention dĂ©taillĂ©e et rigoureuse voulue pour d’importants changements lĂ©gislatifs. Quant aux projets de loi qui ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s en dĂ©tail, soit il y avait des raisons de s’opposer Ă  leur adoption, soit le gouvernement n’Ă©tait pas disposĂ© Ă  y apporter les modifications voulues pour assurer un appui suffisant Ă  leur adoption. Dans le cas de projets de loi Ă  l’Ă©gard desquels des comitĂ©s parlementaires avaient prĂ©cĂ©demment adoptĂ© des modifications, les mĂŞmes propositions ont maintenant Ă©tĂ© intĂ©grĂ©es au projet de loi C-10 sans ces modifications mĂ»rement rĂ©flĂ©chies. Par ailleurs, le projet de loi C-10 ajoute des modifications Ă  des projets de loi qui ont prĂ©cĂ©demment Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s par des comitĂ©s parlementaires, sans indiquer de façon transparente les endroits oĂą de telles modifications ont Ă©tĂ© apportĂ©es. Une telle transparence aurait facilitĂ© l’examen par des organisations intĂ©ressĂ©es comme l’ABC qui tentent de commenter le projet de loi C-10 dans toute son Ă©tendue dans le court dĂ©lai octroyĂ©.

Cette annĂ©e mĂŞme, dans une lettre Ă©manant de la prĂ©sidente de la Section du droit de la vie privĂ©e et de l’accès Ă  l’information portant sur le projet de loi C-59, partie 3, division 3, l’ABC a continuĂ© Ă  protester contre l’utilisation des lois omnibus :

Dans des mĂ©moires antĂ©rieurs, la Section de l’ABC a soulevĂ© des prĂ©occupations au sujet de l’introduction de modifications lĂ©gislatives importantes au moyen de lois budgĂ©taires omnibus. Jointe au temps extrĂŞmement limitĂ© que donnent les comitĂ©s parlementaires au public pour prĂ©senter des commentaires sur ces mesures, cette pratique entrave la formulation d’observations approfondies et la tenue d’un dĂ©bat sur d’importantes modifications lĂ©gislatives.

Alors qu’il n’existe aucune garantie que l’ABC approuve l’ensemble de l’ordre du jour lĂ©gislatif du gouvernement tel qu’il sera rĂ©vĂ©lĂ© au fil des prochains mois et dans les annĂ©es Ă  venir, Ă  ce jour, il y a au moins un point sur lequel l’Association est tout Ă  fait d’accord.