Loin d’être un bolide : étude sur les délais des audiences pénales

  • 24 fĂ©vrier 2016

Lorsque le ComitĂ© sĂ©natorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a lancĂ© une Ă©tude sur les retards dans les audiences d’affaires criminelles au Canada au dĂ©but du mois de fĂ©vrier, l’ABC a eu l’occasion de discourir sur un sujet qui lui tient Ă  cĹ“ur. Toutefois, elle a bĂ©nĂ©ficiĂ© de très peu de temps pour se prĂ©parer Ă  exprimer ses points de vue.

Le 18 fĂ©vrier, Tony Paisana, de Peck & Co. Ă  Vancouver, et Ian Carter, de Bayne Sellar Boxall Ă  Ottawa, se sont respectivement adressĂ©s au ComitĂ© dans une vidĂ©oconfĂ©rence et en personne au nom de l’ABC avec un mĂ©moire regroupant des commentaires et mĂ©moires antĂ©rieurement prĂ©sentĂ©s au gouvernement par la Section nationale du droit pĂ©nal.

Dans une lettre envoyĂ©e le 16 fĂ©vrier au sĂ©nateur Bob Runciman, prĂ©sident du comitĂ©, Suzanne Costom, prĂ©sidente de la Section du droit pĂ©nal, affirmait que le court prĂ©avis dont la section avait disposĂ© avait « limitĂ© grandement ses possibilitĂ©s » et que ses membres seraient « heureux de paraĂ®tre devant le comitĂ© Ă  une date ultĂ©rieure moyennant un prĂ©avis plus gĂ©nĂ©reux, car ils seraient alors en mesure d’entrer davantage dans le dĂ©tail. »

Bien qu’il ait possiblement Ă©tĂ© rĂ©digĂ© Ă  la hâte, le mĂ©moire exposait nĂ©anmoins plusieurs secteurs de prĂ©occupation et proposait de nombreuses solutions pour attĂ©nuer les problèmes que causent les longs dĂ©lais dans les audiences d’affaires criminelles.

Par exemple, la section soulignait que l’obligation de divulguer – c’est-Ă -dire la collecte de renseignements, la prĂ©paration, l’ajournement d’affaires alors que davantage d’information est recueillie, et la rĂ©vision – constitue l’un des facteurs les plus importants qui entraĂ®nent le retard de cas en instance. La section recommande « d’amĂ©liorer les politiques de la Couronne et des services policiers relativement Ă  la prĂ©paration des documents Ă  divulguer, notamment dans les affaires qui n’exigent pas une approbation immĂ©diate de l’inculpation. Le but devrait ĂŞtre de fournir le plus de documents possible dès la première audience. » Elle propose Ă©galement de permettre aux services policiers d’engager des conseillers et du personnel de soutien chevronnĂ©s pour vĂ©rifier les documents avant qu’ils soient remis Ă  la Couronne.

L’incapacitĂ© Ă  estimer avec exactitude la durĂ©e d’une affaire judiciaire explique souvent les retards. Toute affaire qui requiert plus de temps que prĂ©vu retarde les causes qui suivent et prolonge le procès, car l’avocat de la dĂ©fense, la couronne et le juge agissent tous en fonction d’une date de rĂ©solution prĂ©cise, et trouver un moment oĂą ils seront Ă  nouveau disponibles peut ĂŞtre problĂ©matique. « La section recommande donc l’adoption d’une procĂ©dure prĂ©paratoire plus exhaustive, exigeant une comparution devant le juge responsable de la gestion de l’instance et la production de prĂ©visions approfondies sur la structure et la nature du procès et des audiences », prĂ©cise la lettre. « Il vaut mieux prendre un peu plus de temps au dĂ©but pour bien Ă©valuer la durĂ©e des procĂ©dures, plutĂ´t que de fixer l’horaire hâtivement et de devoir l’ajuster quand le manque de temps devient Ă©vident. »

Les technologies pourraient rĂ©duire la perte de temps en permettant Ă  l’accusĂ© ou Ă  l’avocat de la dĂ©fense de faire des apparitions Ă©lectroniques lors de comparutions initiales de routine, « lorsque le diffĂ©rend ne nĂ©cessite pas une surveillance judiciaire. »

Autres recommandations formulĂ©es dans la lettre :

  • Favoriser le règlement des causes en amont – Selon la section, plus de 90 pour cent des affaires criminelles se règlent sans procès. « Plus on Ă©vite les procès inutiles, moins on gaspille le temps des tribunaux. » Il s’agit d’un autre argument en faveur d’une communication de la preuve convenable, car le bien-fondĂ© d’une affaire n’est souvent pas tout Ă  fait saisissable avant que tous les documents n’aient Ă©tĂ© divulguĂ©s, ce qui peut prendre des mois. Les peines minimales obligatoires et les restrictions imposĂ©es Ă  la Couronne ajoutent aux dĂ©lais. Offrir une diminution plus considĂ©rable de la peine lors de plaidoyers hâtifs pourrait reprĂ©senter l’une des solutions, tout comme l’instauration d’une rĂ©munĂ©ration des juristes de l’aide juridique qui incite aux rĂ©solutions rapides et d’un rĂ©gime plus serrĂ© d’approbation de l’inculpation par la Couronne.
  • Pourvoir les postes de juges vacants et nommer Ă  la magistrature des criminalistes chevronnĂ©s.
  • Augmenter aussi bien le financement fĂ©dĂ©ral que la responsabilitĂ© fĂ©dĂ©rale en matière d’aide juridique, et offrir plus de ressources aux rĂ©gimes d’aide juridique et aux bureaux de la couronne pour attirer des juristes d’expĂ©rience.
  • Restaurer la Commission de rĂ©forme du droit du Canada de façon Ă  ce qu’elle continue Ă  Ă©toffer solidement les argumentaires qui Ă©tayeront l’Ă©volution de la lĂ©gislation.

« Pour terminer, nous prĂ©conisons la prudence dans toute entreprise de rĂ©forme des concepts fondamentaux du droit pĂ©nal », Ă©crit Me Costom.

« Les enjeux sont complexes et souvent reliĂ©s, et une modification mineure qui semble faire consensus pourrait avoir des rĂ©percussions imprĂ©vues. »

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