Winner of the 2020 Municipal Law Student Essay Contest

  • September 25, 2020

Étude d’effectivité sur les réprimandes officieuses et officielles imposées par la Commission municipale du Québec entre 2012 à 2016

(paper only available in French)

par Yezhou Shen, Candidate à la maîtrise, Université de Sherbrooke

Introduction

Présentation générale du sujet et objet scientifique

Dans un texte publié en 20131, Marc Lalonde soulève une question d’effectivité juridique concernant le régime actuel d’encadrement éthique et déontologique des élus municipaux. Pour ce faire, l’auteur porte à l’attention du public la décision Moreau (Re)2 dans laquelle la Commission municipale du Québec, face à une contravention admise et non-contestée aux valeurs du Code d’éthique et de déontologie par un conseiller municipal, refuse de lui imposer une sanction. Effectivement, la Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale3 habilite la Commission à prendre une telle mesure seulement en cas de violation d’une règle déontologique du Code. En l’occurrence, son intervention s’était limitée à « constater et déplorer la situation.4» Bref, l’absence de conséquences juridiques assumées par l’élu malgré un comportement considéré répréhensible aux termes du Code remet en doute l’effectivité de ce dernier et de la LEDMM. À la lumière de ce qui précède, une étude d’effectivité s’impose afin de confirmer ou de réfuter la préoccupation soulevée par Lalonde à propos des défaillances du système de réglementation actuel de l’éthique et de la déontologie des élus municipaux.

Pour ce faire, la présente étude propose d’examiner l’effectivité de deux mesures que la Commission municipale du Québec se permet d’imposer. La première fait partie des sanctions prévues par la LEDMM à l’art. 31 (1) ; il s’agit de la réprimande. La deuxième mesure est de nature plus officieuse, car aucune disposition législative n’habilite le décideur à la prendre. En effet, il arrive que, sans toutefois imposer une des peines énumérées à l’art. 31 LEDMM, la Commission condamne néanmoins la conduite de l’élu faisant l’objet de la plainte à l’origine du dossier par une « réprimande officieuse » comme dans le cas d’André Moreau.

Questions de recherche

La question de recherche principale est : quelle est l’effectivité d’un point de vue sociologique des réprimandes régulières et officieuses que la Commission municipale du Québec impose aux élus municipaux faisant l’objet d’une plainte en vertu de la LEDMM ?

La collecte de données empiriques servira principalement à mesurer l’étendue des conséquences subies par l’élu faisant l’objet d’une réprimande régulière ou une réprimande officieuse, mais cet exercice dépassera la simple recherche juridique. Ceci dit, compte tenu de la dimension sociologique de la question principale, il y a lieu de vérifier si la carrière politique de l’intéressé à la clôture du dossier devant la Commission constitue un indicateur de l’effectivité symbolique des réprimandes qui s’insèrent dans les décisions à titre de sanction ou à titre de reproche. Plus précisément, les données empiriques serviront à répondre aux interrogations suivantes :

  1. Une réprimande au sens de l’art. 31 (1) LEDMM affecte-t-elle la carrière politique d’un élu municipal ?
  2. Une réprimande officieuse affecte-t-elle la carrière politique d’un élu municipal ?

Méthodologie

Approche retenue

La sociologie constituera l’approche retenue en l’occurrence, car une étude sur l’effectivité puisera immanquablement des notions propres à ce domaine5. Ceci dit, les enseignements de cette discipline justifient de mesurer les conséquences des réprimandes exprimées par un décideur de la Commission municipale du Québec suite à une plainte contre un élu municipal au regard d’une conception de l’effectivité qui dépasse6 son sens classique. Effectivement, les développements en sociologie juridique admettent, à l’égard de l’effectivité et de l’ineffectivité, plusieurs significations7 abordées ultérieurement (dans la section Discussion du présent travail). Pour cette raison, le sort de la carrière politique d’un élu politique devient pertinent à l’étude.

Selon l’auteur Leroy, toute étude d’effectivité commande une compréhension préalable des finalités de l’objet juridique examiné8. Pour les fins du présent travail, je tiendrais pour acquis que les réprimandes visent le même objectif que la LEDMM en général, une tentative de réprimer les scandales politiques impliquant les élus municipaux9, mais la question sera davantage développée dans la section Discussion.

Collecte de données

La collecte de données empiriques se divise en deux étapes. En premier lieu, il faut identifier les conseillers et les maires municipaux ayant fait l’objet d’une réprimande régulière (groupe A) ou d’un reproche officieux (groupe B) dans le cadre d’une plainte déposée en vertu de la LEDMM à partir des décisions administratives accessibles publiquement sur le site de la Commission. La présente étude se limitera aux jugements parus entre les années 2012 à 2016, car les dernières élections remontent à 2017. Ensuite, j’exclurai des deux groupes ceux qui ont subi, en plus de la réprimande, une autre sanction prévue par l’art. 31 LEDMM telle qu’une suspension. En second lieu, ma démarche se poursuivra en déterminant au sein du groupe A le pourcentage de réélection calculé à partir du nombre d’individus n’ayant pas, après la publication de la décision qui les intéresse, démissionné de leur fonction politique, renoncé à se présenter aux prochaines élections ou échoué à renouveler leur mandat malgré le dépôt d’une candidature. Certes, ces trois types de dénouements sont reliés à des causes différentes : tandis que le premier dépend de l’opinion du public, les deux autres découlent d’une perception de l’élu en question sur ses probabilités de voir son mandat renouvelé. Cependant, le faible nombre de candidats admissible à la présente étude ne permet pas à la méthodologie d’en faire la distinction. Afin de donner une valeur au résultat obtenu, il va falloir le comparer à une autre donnée. Il s’agit du pourcentage général de réélection, dans tous les conseils municipaux auxquels siégeaient les membres du groupe A au moment du prononcé de leurs réprimandes respectives, à l’année de leur publication. Vers la suite, je répéterai l’exercice avec le groupe B. Pour les fins du présent travail, pour des raisons d’ordre logistique, malgré l’accessibilité publique aux motifs et aux verdicts à l’issue des plaintes devant la Commission, un élu réprimandé sera uniquement considéré comme dûment réélu uniquement s’il reste dans le même conseil municipal10. L’organisation des résultats électoraux sur le site du Ministère des Affaires municipales11 du Québec justifie ce choix méthodologique ; ceux-ci se trouvent classés par nom de municipalité.

Hypothèse

Prédictions

Selon mes prédictions, le pourcentage de réélection des individus du groupe A sera significativement inférieur au taux de réélection général de leurs conseils respectifs après le prononcé du verdict à l’égard de la personne intéressée. La même prédiction peut être faite à l’égard des membres du groupe B par rapport à leurs homologues faisant partie du même conseil au moment de la publication de la décision comportant la réprimande officieuse. Également, la différence entre le taux de réélection des membres du groupe A et de leurs pairs sera plus prononcée que l’écart constaté entre le taux de réélection des membres du groupe B et de celui des autres élus qui siégeaient à leurs côtés au moment de leur réprimande.

Justification des prédictions

Dans une publication parue en 1986, les auteurs Lascoumes et Serverin font état des diverses manières d’évaluer l’effectivité d’une norme12. Parmi celles-ci, l’étude de l’instance de contrôle constitue la démarche la plus pertinente à la question principale, car deux de ses volets consistent à mesurer la gravité de la sanction imposée en cas de la violation d’une norme de nature répressive et la visibilité de la peine13.  Bien que d’une perspective légaliste, les réprimandes régulières ou officieuses paraissent ineffectives comme sanction en termes de gravité, du moins comparativement aux autres sanctions prévues à l’art. 31 LEDMM, l’adoption d’un point de vue plus pragmatique14 permettrait d’aboutir à une conclusion différente. D’ailleurs, Rangeon a déjà admis la pertinence, dans l’analyse de l’effectivité d’une règle de droit, de mesurer ses effets extra-juridiques comme les conséquences symboliques sur ses destinataires15, les élus municipaux réprimandés en l’occurrence. Ceci dit, les effets symboliques des réprimandes de la Commission sur ces individus intéressent certainement l’examen de l’effectivité de ces sanctions légales ou officieuses. Pour ces raisons, les données empiriques récoltées dans le cadre du présent travail sont indicatrices de la survenance d’une condamnation politique dans la carrière des individus réprimandés par la Commission, une forme de sanction symbolique révélatrice d’une certaine effectivité. Ainsi, selon mon hypothèse, les réprimandes régulières et reproches officieux sont tous les deux porteurs d’une certaine effectivité juridique, car ils ont une incidence sur la carrière politique de l’individu concerné et sur ses probabilités de garder son poste ou de se faire réélire. Cependant, l’impact d’une réprimande au sens de l’art. 31 (1) LEDMM sera plus significatif que celui d’un reproche officieux en raison de sa visibilité16 : alors que la première est documentée toujours à la fin de la décision avec le mot « IMPOSE » en début de la phrase, la deuxième se remarque moins facilement, car elle se trouve à une place généralement plus subtile au milieu des motifs de la décision. En conséquence, les résultats obtenus devraient indiquer un taux de réélection plus faible chez les membres du groupe A par rapport au groupe B à la lumière d’une comparaison avec leurs pairs.

Présentation des résultats

Tableau 1 : Pourcentage de réélection des élus réprimandés au sens de la LEDMM entre 2012 à 2016 et pourcentage général de réélection dans leurs conseils respectifs

Nombre d’individus faisant partie du groupe A : 8
Pourcentage de réélection des membres du groupe A : 0 %
Nombre total de sièges dans les conseils municipaux dont au moins un membre fait partie du groupe A : 161
Pourcentage général de réélection : 55,0 %

Tableau 2 : Pourcentage de réélection des élus réprimandés officieusement entre 2012 à 2016 et pourcentage général de réélection dans leurs conseils respectifs

Nombre d’individus faisant partie du groupe B : 5
Pourcentage de réélection des membres du groupe B : 0 %
Nombre total de sièges dans les conseils municipaux dont au moins un membre fait partie du groupe B : 45
Pourcentage général de réélection : 57,0 %

Retrait d’un cas particulier et justification

Suite à des recherches plus approfondies sur les circonstances entourant la démission de Paul Veilleux, initialement un membre du groupe A, j’ai décidé de retirer le personnage de mon étude. Malgré la réprimande ordinaire qu’il a subie en 201317, les motifs de sa démission antérieure au dépôt de la plainte à son égard et la nature du manquement retenu par la Commission dans l’étude de son dossier attestent de l’absence de lien de causalité entre la sanction imposée et la fin de sa carrière politique.

En date du 12 juillet 2012, plus d’un an avant la fin prévue de son mandat en tant que conseiller municipal, Paul Veilleux a démissionné de ses fonctions. Le même jour, lors d’une séance extraordinaire, le conseil de Beauceville adopte une résolution unanime acceptant sa candidature au poste de responsable technique de la municipalité18. Or, la réprimande de la Commission municipale du Québec, imposée en mai 2013, visait justement un courriel envoyé par Veilleux au conseil de ville avant sa démission : il s’agissait d’un conflit d’intérêts, car la communication contenait ses exigences relatives aux conditions d’emploi19. Ainsi, les décideurs reprochent à l’ancien conseiller d’avoir favorisé « ses intérêts personnels au détriment de ceux de la Ville, laquelle aurait eu tout intérêt à négocier des conditions plus avantageuses 20». Pour cette raison, sa renonciation à se représenter aux élections municipales subséquentes en 201721, décision prise probablement bien avant le dépôt de la plainte, ne traduit pas réellement un effet symbolique des réprimandes prononcées par la Commission municipale du Québec.

Discussion

Finalités des reproches

Plusieurs auteurs, dont Bégin et Chénard22, ont vu le lien entre les objectifs de la LEDMM et le contexte de son adoption en 2010. Plusieurs scandales dans le monde politique tant à l’échelle provinciale que municipale ont secoué la société québécoise. Face à la grande diminution de la confiance du public envers leurs politiciens, le législateur québécois a remarqué la nécessité d’encadrer la conduite des élus provinciaux et municipaux au niveau éthique et déontologique à travers deux nouvelles lois23, le Code d’éthique et de déontologie des membres de l’Assemblée nationale24 et la LEDMM.

Selon Louise Lalonde, l’engouement du législateur québécois pour les lois éthiques au cours des dernières années résulte du constat de l’inadéquation entre les « attentes éthiques 25» de la population et la délimitation par le droit du domaine de la licéité. Effectivement, les médias ont fait état de plusieurs cas où le comportement d’un membre de l’administration publique, sans constituer un manquement à une règle de droit, a choqué la conscience collective26. Une citation que l’auteure emprunte à Jean Carbonnier illustre bien le problème : « le licite n’est pas toujours moral 27». En réponse à l’incapacité du droit positif à réprimer adéquatement ces actes condamnés socialement, le législateur a décidé d’incorporer une dimension éthique et réflexive au régime juridique actuel qui encadre actuellement la conduite des politiciens provinciaux et municipaux en les invitant à réfléchir par eux-mêmes sur les standards qu’ils devraient adopter en tant que destinataires de la norme28. Il s’agit d’une manière de concilier les « attentes éthiques des citoyens29 » avec l’effritement du « socle des valeurs communes », symptôme caractéristique des sociétés pluralistes30.

Dans la mesure où la décision finale de déterminer la sanction appropriée à chaque dossier revient au décideur de la Commission municipale du Québec, il faut reconnaître que les finalités des réprimandes imposées par cette instance se rapprochent davantage de l’analyse contextuelle de Bégin et de Chénard que de la thèse de Louise Lalonde31. D’ailleurs, les propos tenus par la Commission municipale confirment également la proposition avancée. Dans Legresley (Re)32¸ cette instance administrative a imposé une réprimande à un conseiller municipal malgré son repentir, sa compétence et son engagement à ne pas récidiver, car « la sanction doit dissuader les élus de contrevenir à cette règle.33» De plus, dans un autre dossier de plainte visant André Moreau34, les décideurs font appel à un argument téléologique à l’étape de la détermination de la sanction appropriée : « la sanction doit permettre de rétablir la confiance que les citoyens doivent entretenir envers les institutions et les élus municipaux. 35» En somme, pour les fins du présent travail, il y a lieu de retenir que les réprimandes imposées par la Commission municipale servent à préserver la crédibilité des maires et des conseillers aux yeux du public et à réprimer les manquements aux règles déontologiques et éthiques retenues par le conseil municipal.

Corroboration des hypothèses

À la lumière du Tableau 1 et du Tableau 2, les données empiriques recueillies dans le cadre de ce projet confirment les prédictions formulées à l’étape de l’hypothèse : le taux de réélection des membres du groupe A comme du groupe B s’avère inférieur au taux de réélection de leurs pairs qui demeure relativement constant. En effet, cette mesure ne varie que de 2,8 % d’un tableau à l’autre. Cependant, tel qu’attendu, l’écart entre le taux de réélection des membres groupe A et le taux de réélection chez les pairs du Tableau 1 (55 %) est beaucoup plus prononcé que l’écart observé entre le taux de réélection du groupe B et le taux de réélection du Tableau 2 (17,8 %).

Approche classique de l’effectivité et sociologie juridique : portée de la notion

Selon l’approche classique de l’effectivité du droit, celle-ci s’apprécie en fonction de la suffisance de l’adéquation entre une norme donnée et les destinataires de celle-ci et de son application par les autorités en cas de sa violation par l’imposition de la sanction prévue à cet effet36. Or, plusieurs auteurs37 déplorent l’incompatibilité de cette vision avec les systèmes juridiques modernes composés non seulement de normes impératives, mais aussi de normes supplétives. Pour les règles rattachées à une forme de punition en cas de violation, la conception traditionnelle de l’effectivité commande l’observation de la capacité de la sanction à constituer une menace suffisante pour les destinataires de la norme tentés de ne pas la respecter. Ainsi, pour les tenants de l’approche traditionnelle, la sanction sert à « rétablir l’effectivité du droit lorsque celui-ci a été violé38 ».

Les développements subséquents sur le sujet invitent l’incorporation de nouveaux éléments étrangers à l’approche classique, car les auteurs prennent de plus en plus conscience que « l’action du droit s’opère surtout ‘’à travers les usages que les acteurs font de la règle, et qui ne coïncident pas nécessairement avec les objectifs poursuivis initialement par le législateur’’39 ». Ceci dit, il devient alors courant d’examiner l’effectivité d’une norme autrement que selon les préceptes de la thèse traditionnelle ; la proposition d’Ost et Van de Kerchove, « est effective la règle utilisée par ses destinataires comme modèle pour orienter leur pratique40 », illustre bien l’avènement d’une mise à jour de la traditionnelle perspective légaliste. Désormais, l’appréciation de l’effectivité du droit admet l’intérêt d’observer les effets d’une norme non seulement sur les destinataires primaires de celles-ci, « les individus auxquels la règle s’adresse41 », mais aussi sur les destinataires secondaires, les autorités responsables de son application et de l’imposition des sanctions en cas de violation42. D’ailleurs, selon Mader, l’étude de l’effectivité d’une règle consiste à examiner les comportements imputables à celle-ci par un lien de causalité43. En somme, les nouvelles conceptions de l’effectivité conservent l’objectif traditionnel de mesurer le degré de prise en compte d’une norme tout en reconnaissant que celle-ci puisse se manifester de plusieurs manières différentes44.

Selon Rangeon, l’effectivité du droit s’évalue justement en mesurant ce degré de « prise en compte » ou d’acceptation45 de la norme étudiée par les individus et par la collectivité46. De ce fait, plutôt que de se limiter aux conséquences « visibles » de l’objet d’étude comme la connaissance par ses destinataires, l’auteur suggère d’observer, entre autres, ses effets symboliques qui peuvent être de nature juridique ou extra-juridique qu’ils entrent ou non dans le champ de prédiction du législateur 47: « [p] our être effectif, le droit doit être accepté par ses destinataires, c’est-à-dire reconnu, mais pas nécessairement connu.48» D’ailleurs, le comportement pertinent à l’appréciation de l’effectivité du droit peut être individuel ou collectif49 comme dans le cas de la présente étude : l’analyse des résultats électoraux découlent à la fois du choix de l’ensemble des électeurs du district ou de la municipalité et de l’évaluation personnelle d’un élu réprimandé quant à l’opportunité de continuer sa carrière politique après le prononcé de sa sanction.

À la lumière de ce qui précède, eu égard à la volonté de Yann Leroy de concilier les thèses des auteurs mentionnés précédemment entre autres, la conception moderne de l’effectivité qu’il propose regroupe les caractéristiques de l’approche classique et les améliorations suggérées par les développements subséquents sur la matière. De cette façon, cet auteur reconnaît l’intérêt et l’importance dans l’étude de l’effectivité d’une règle d’examiner les effets, prévus ou non, de celle-ci du moment qu’ils « correspondent [à ses finalités] ou, plus précisément encore, [qu’ils] ne sont pas en opposition avec les valeurs que la règle véhicule 50».  À cet effet, tout comme la thèse de Rangeon, l’approche moderne de Leroy autorise la prise en compte des conséquences concrètes, symboliques, sociales, économiques, etc. peu importe leur nature juridique ou non-juridique51. En l’occurrence, puisque le présent exercice consiste à examiner l’effectivité d’une norme, l’interdiction de violer les normes prévues au Code, à travers les méthodes de sanction en cas de violation52, l’exercice, à première vue, se porte à une analyse selon l’approche classique. Cependant, puisque l’observation comportementale se réalise à la fois chez les élus municipaux des groupes A et B, les destinataires primaires de la sanction de manière individuelle, et chez les citoyens exerçant leur droit de vote, les destinataires secondaires informels53 de manière collective, l’exercice n’entre pas exactement dans le cadre traditionnel de l’analyse de l’effectivité du droit. Pour cette raison, il y a lieu d’adopter la thèse de Leroy dans le choix du sens de cette notion aux fins du présent travail.

À la lumière de ce qui précède, une règle juridique peut se montrer effective lorsque son existence entraîne des effets sur le comportement « qui ne sont pas pris en charge par le droit, qui ne sont pas intégrés dans l’ordre juridique, qui ne sont pas sanctionnés 54» compte tenu de leurs répercussions symboliques55. En l’occurrence, la réaction des citoyens détenant le droit de vote et la décision de se représenter ou non aux élections subséquentes suite au prononcé d’une réprimande par la Commission ne font pas l’objet d’un encadrement juridique à proprement parler : rien dans le droit positif ne prohibe à un élu touché par ce type de sanction de proposer sa candidature pour un prochain mandat56 et rien n’interdit de voter pour lui non plus. En conséquence, ces deux réactions à une réprimande ne s’appuient sur aucun fondement purement juridique ; elles relèvent plutôt des conséquences non-juridiques des sanctions prévues par la LEDMM. Pourtant, elles permettent de mesurer l’effectivité de cette loi. Dans une publication de l’auteur Carbonnier, celui-ci fait allusion à l’« effectivité invisible » de certaines règles de droit : il s’agit de leurs effets psychologiques sur les individus57.  Le sentiment de « mauvaise conscience » et une certaine « insécurité juridique » engendrés par certaines règles de droit, malgré leur violation, constituent de bons exemples de cette observation58.

En somme, compte tenu de la portée trop restrictive de la conception classique de l’effectivité, il y a lieu d’adopter l’interprétation de cette notion proposée par Leroy qui sied bien plus à la présente étude, car elle permet la mesure des effets symboliques d’une réprimande à travers le comportement des destinataires primaires et secondaires informels de la norme.

Autres études pertinentes

a) Choix des critères pour conclure à la non-réélection

La réaction des électeurs face à l’inconduite de leurs politiciens au palier municipale a fait l’objet de plusieurs publications pertinentes à l’explication des résultats obtenus dans le cadre du présent travail. En effet, plusieurs auteurs reconnaissent aux citoyens détenant le droit de vote un pouvoir59 de punir leurs représentants politiques pour leurs méfaits en exigeant sa démission60 ou en soutenant un candidat rival61 :

In democracies, apart from criminal liability, elected politicians are also bound by a concept of political responsibility, central to the contract of representation between voters and those elected to represent them. Given the incapacity or proved difficulty of the judiciary to condemn politicians for serious abuse of office, the possibility to punish corrupt behaviour at the ballot box becomes the ultimate sanction to make politicians responsible for their misdeeds and to restore a minimal concept of legality in politics62.

Une étude empirique63 à travers une mise en contexte des sujets interrogés démontre l’existence réelle d’une volonté des citoyens de combattre les comportements malhonnêtes du maire fictif en pouvoir dans la trame factuelle en refusant de l’appuyer aux élections subséquentes, peu importe son niveau de compétence. De plus, les données recueillies dans le contexte d’une recherche effectuée par Lemmencier et Duraisamy révèlent la suffisance des accusations de corruption à décourager les maires français à se présenter aux élections subséquentes à la fin de leur mandat, mais une condamnation devant un tribunal possède une force dissuasive encore plus forte64. Bref, la littérature considère clairement la renonciation à porter sa candidature en vue d’une réélection, la démission et la diminution de la popularité auprès des citoyens votants, situations à constater pour conclure à la non-réélection de l’élu dans le présent projet par ailleurs, comme des conséquences d’une sentence imposée à un politicien pour une inconduite. Cependant, compte tenu de la discrétion absolue des destinataires secondaires informels dans l’exercice de la prérogative de sanction, il y a lieu de se pencher sur les facteurs qui renforcent les effets symboliques de la réprimande et ceux qui les affaiblissent.

b) Éléments factuels déterminant l’effectivité symbolique des réprimandes

Le mécanisme de répression des inconduites chez les élus municipaux par l’exercice du droit de vote requiert, pour son efficacité, une combinaison d’éléments factuels favorables à sa mise en œuvre. De Sousa et Moriconi, dans une publication parue en 2013, en énumèrent quelques-uns :

The reward–punishment idea, imbedded in the social contract tradition of John Locke, John S., Mill, the Federalists and others, not only requires an institutional framework that enables representative government, based on freedom of choice, pluralism and an effective system of checks and balances, but also a citizenry which is sufficiently motivated, informed and competent to intervene in the public sphere by ratifying policy options and delegating power to those entrusted to rule through universal, fair and competitive elections and ‘a relatively high degree of control over leaders’.65

En somme, le degré de motivation des citoyens à combattre les manquements déontologiques des élus municipaux et l’accès à l’information crédible font partie des critères déterminants dans l’effectivité symbolique des réprimandes prononcées par la Commission municipale66.

Selon plusieurs auteurs, l’intérêt des électeurs de faire usage de leur prérogative de punir un politicien corrompu67 diminue considérablement lorsqu’ils apprécient néanmoins sa compétence68. Les données empiriques quant aux probabilités de réélection des maires espagnols accusés de corruption recueillies par Muñoz, Anduiza et Gallego pointent vers cette direction :

It is the exchange mechanism69 that, in our experiment, appears to have the strongest effect. The reported probability of voting for the accused mayor is almost three times larger when the mayor is competent than when he is incompetent. This strongly suggests that supporters of a party are more willing to vote for officials suspected of corruption if they otherwise have a strong track record. Good performance can compensate for dishonesty.70

Mis à part l’appréciation des habiletés professionnelles de l’élu municipal, les citoyens considèrent également, au moment de voter, leurs intérêts personnels :

[V]oters tend to analyse politics more in an instrumental way than through the eyes of ideology. This means that their participation is much more concerned with the fulfilment of their basic needs, then the protection of any abstract definition of collective good or political imaginary. They value efficacy above all other ethical standards, such as integrity, transparency or even legality. Against a background of poor institutional performance and high informal political exchanges, such a functionalist conception of politics creates the conditions for condoning corruption for a just cause71.

D’ailleurs, l’étude empirique effectuée par Lemmenicier et Duraisamy confirme la préférence des électeurs pour des candidats capables de leur procurer des bénéfices personnels ou affiliés à un parti politique dont le programme électoral présente plus d’affinités avec leurs intérêts par rapport à des compétiteurs plus intègres72 : « [v]oters knowingly choose corrupt politicians because of various personal benefits they enjoy in return for casting their votes favouring the individual or the party to which he/she is affiliated. 73» Par ailleurs, l’auteure Becquart-Leclerq répertorie les réactions aux actes de corruption en deux catégories dans un passage qui explique bien l’effectivité présente mais de manière imparfaite des sentences imposées aux politiciens à l’égard des destinataires secondaires informels : « there are two levels of anchorage of people’s judgments about corruption: a symbolic level, based on abstract morals, and a strategic one, based on the application of morality to real circumstances. These two levels are not always in accordance.74 »

Ainsi, malgré un désir réel de s’opposer aux manquements déontologiques de leurs élus, les citoyens priorisent souvent, lors des élections municipales subséquentes, le savoir-faire politique, leurs intérêts personnels et leur loyauté à leur parti politique préféré. Pour cette raison, les résultats du Tableau 1 et du Tableau 2 traduisent effectivement les impacts négatifs d’une réprimande régulière ou officieuse sur la carrière de l’élu municipal touché, mais les publications citées ci-haut permettent de comprendre les facteurs atténuant l’effectivité symbolique de ces sanctions.

La confiance du public envers les sources d’information constitue un autre élément déterminant dans le choix d’un électeur d’exercer sa prérogative de réprimer les comportements contraires au Code. À cet effet, dans leur analyse du niveau de tolérance des électeurs à l’égard des actes de corruption commis par les politiciens, les auteurs distinguent les sources judiciaires, les tribunaux et les instances administratifs, des sources médiatiques comme les journaux75 ou la radio76. Puisque le degré et la qualité couverture médiatique diffèrent énormément d’une municipalité québécoise à l’autre, variation qui n’a été d’ailleurs pas prise en compte lors de la collecte de données, il y a lieu, pour les fins du présent article, de se limiter aux constations suivantes : lorsque les électeurs ne se sentent pas convaincus de la crédibilité de la publication ou de l’individu qui rapporte un mauvais comportement d’un politicien, moins d’entre eux ajustent leurs choix politiques en conséquence. De plus, ils associent facilement ces allégations à des manœuvres orchestrées par ses adversaires dans le but de le discréditer77. Cependant, la liberté de la presse constitue une condition cruciale à l’effectivité des sanctions imposées aux politiciens par les tribunaux qui n’arrivent pas à suffisamment alerter la population de ces condamnations par eux-mêmes78. Autrement, en ce qui concerne la force de conviction des sources judiciaires, selon de Sousa et Moriconi, les électeurs réagissent moins négativement à la corruption des politiciens lorsque les instances décisionnelles n’inspirent pas leur confiance79 :

Consequently, if citizens do not trust the judicial system, it is hard to conceive that they will trust any indictment or judgment on political corruption from an institutional entity that has not enough moral prestige to give credit to its decisions. In such a context, voters may consider that accusations are matters of cheap-talks to damage the reputation of the electoral opponent and that the truth has been distorted by a politically biased or ineffective judicial system, hence the indictments or judgments raised against their candidate are perceived as a set-up.80

Inversement, il faut comprendre que les décisions d’une institution juridique ou administrative réputée aux yeux du public jouissent d’une plus grande influence lors des élections. En conséquence, la correspondance des résultats aux prédictions posées à l’étape de l’hypothèse suggère fortement la reconnaissance de l’autorité de la Commission municipale, la seule source d’information commune à tous les cas du groupe A et du groupe B, et de son habileté d’enquête par les citoyens.  D’ailleurs, dans toutes les décisions81, les phrases suivantes s’y trouvent :

Dans le cadre d’une enquête en vertu de la LEDMM, la Commission doit s’enquérir des faits afin de décider si l’élu visé par l’enquête a commis les actes ou les gestes qui lui sont reprochés et si ces derniers constituent une conduite dérogatoire au Code d’éthique et de déontologie. Pour ce faire, elle doit conduire son enquête dans un esprit de recherche de la vérité qui respecte les règles d’équité procédurale et le droit de l’élu visé par l’enquête à une défense pleine et entière. […] Ainsi, et même si on ne peut parler de fardeau de preuve comme tel, la Commission doit tout de même être convaincue que la preuve qui découle des témoignages, des documents et des admissions, a une force probante suffisante suivant le principe de la balance des probabilités, pour lui permettre de conclure que l’élu visé par l’enquête a manqué à ses obligations déontologiques et a enfreint le Code d’éthique et de déontologie. En raison du caractère particulier des fonctions occupées par un élu municipal et des lourdes conséquences que la décision pourrait avoir sur celui-ci au niveau de sa carrière et de sa crédibilité, la Commission est d’opinion que pour conclure à un manquement au Code d’éthique et de déontologie, la preuve obtenue doit être claire, précise, sérieuse et sans ambiguïté. […] La Commission tient à souligner qu’on ne peut accorder aux doutes, aux impressions, aux insinuations, ou aux soupçons, la valeur probante nécessaire pour permettre de conclure à un manquement à une règle du Code d’éthique et de déontologie.82

La réitération constante de ce passage, inutile à première vue, aide à cimenter la crédibilité des verdicts de la Commission municipale dans les dossiers de plainte qu’elle traite, à guider le public vers un choix informé aux élections subséquentes et, de ce fait, à accroître l’effectivité des réprimandes qu’elle prononce. De plus, lorsqu’un décideur détecte une intention réelle de nuire à la carrière politique de l’élu municipal visé par la plainte lors du dépôt de celle-ci, il la dénonce systématiquement avant d’écarter les accusations :

Les demandes d’enquête déposées en vertu de la LEDMM ne doivent pas être utilisées à des fins politiques, personnelles ou partisanes, dans le but de régler des conflits qui ne touchent pas les agissements d’un élu dans le contexte de ses fonctions municipales83.

En conclusion, la littérature sur la perception et la réaction des électeurs à la corruption des politiciens, avec les ajustements nécessaires, fournissent des explications intéressantes sur les résultats obtenus dans le cadre de la présente étude portant sur les effets symboliques des réprimandes prononcées dans les dossiers de plainte contre un élu municipal : malgré leur aversion pour les comportements questionnables de leur maire ou de leur conseiller de district (d’arrondissement dans le cas de Montréal), les citoyens relativisent la nécessité de leur infliger une sanction à leur tour pour plusieurs raisons. Entre autres, leur appréciation des prouesses professionnelles du politicien touché par la réprimande, leurs intérêts personnels et leur loyauté à un parti politique en particulier font partie des éléments susceptibles de diminuer l’effectivité de ce type de sanction. Par contre, la crédibilité de la Commission municipale contribue à rendre les réprimandes qu’elle prononce plus fiables aux électeurs dans leur choix de sanctionner l’inconduite du maire ou du conseiller en question.

c) Effectivité de la réprimande officieuse par rapport à celle de la réprimande régulière

Les publications portant sur le mécanisme de sanction de l’inconduite des politiciens à travers les choix électoraux des citoyens ou à travers la perception des élus eux-mêmes sur leurs chances de se faire réélire n’expliquent pas directement la plus grande effectivité des réprimandes régulières par rapport aux réprimandes officieuses. Par contre, Lemmenicier et Duraisamy apportent potentiellement une réponse à l’interrogation : à partir des données empiriques qu’ils ont traitées, selon leurs prédictions, une condamnation pour un acte de corruption d’un maire diminue les probabilités qu’il participe aux prochaines élections de manière plus importante que dans le cas de son homologue acquitté de ses accusations ou encore rendu à l’étape de l’enquête84. Ceci dit, bien qu’il ne soit pas réellement question de culpabilité ou d’innocence devant la Commission municipale, une décision contenant une réprimande officieuse, en l’absence de toute autre sanction prévue, se rapproche davantage d’un verdict d’acquittement que d’une condamnation. De ce fait, l’étude de Lemminicer et Duraisamy corrobore de manière indirecte l’infériorité de l’effectivité des réprimandes officieuses par rapport à celle des réprimandes au sens de la loi. Quant à l’hypothèse portant sur la plus grande visibilité de ces dernières, elle reste à confirmer, car les données empiriques recueillies et la littérature pertinente au projet ne permettent ni de la nier ni de l’appuyer.

Sources d’erreur et retour sur la méthodologie

Traitement de données : les cas limites

Il est possible que des chercheurs qui essaient de répéter l’exercice avec la même méthodologie parviennent à des résultats finaux qui diffèrent de ceux du Tableau 2 ; tandis que contester l’imposition effective d’une réprimande au sens de la loi semble périlleux, il faut admettre une part de subjectivité dans la détermination de ce qui constitue un reproche officieux. En effet, en l’absence d’indications claires, les propos de la Commission demeurent matière à interprétation. En conséquence, même en gardant la méthodologie proposée par le présent travail, le chercheur, dans une tentative de valider les résultats du Tableau 1 et du Tableau 2, pourrait inclure dans le groupe B des individus qui ne s’y trouvaient pas dans le cadre du présent travail. De ce fait, l’incohérence au niveau du traitement des données peut donner lieu à des altérations aux pourcentages présentés au Tableau 2. Afin d’illustrer cette difficulté méthodologique, il y a lieu de présenter quelques cas limites.

Dans Lalande (Re)85, dossier datant de 2016, lors d’une conférence de presse lancée par le maire Dumais, celui-ci reproche au conseiller Xavier-Antoine Lalande de poser des questions sur la rémunération d’une employée de la municipalité lors d’une séance du conseil, car sa mère pourraient bénéficier d’un ajustement salarial86. Face à cette accusation et à la demande du maire de démissionner, Lalande le met en demeure de déposer une plainte à son égard devant la Commission municipale du Québec87. Le maire accède à la demande ; les décideurs concluent à l’absence de conflits d’intérêts, car il relève du mandat du conseiller municipal de s’informer des affaires internes de la ville. Lalonde n’a donc pas commis de manquement au Code d’éthique et de déontologie. Cependant, la Commission déplore l’imprudence de Lalande, de Dumais et des autres conseillers :

Enfin, il aurait été plus prudent que monsieur Lalande, le maire ou un membre du conseil sollicite l’opinion d’un conseiller à l’éthique et à la déontologie. En effet, toute cette situation découle d’une méconnaissance des règles applicables et d’une incompréhension mutuelle teintée d’une méfiance devant les idées et positions contraires. L’opinion d’un expert dans ce domaine, aurait sans aucun doute permis d’éviter que la situation ne dégénère et n’occasionne des coûts importants sur le plan financier et humain88.

Or, l’emploi du conditionnel par la Commission municipale atténue la gravité de la remarque. Pour cette raison, en l’absence d’une intention claire des décideurs de réprimander Lalande, j’ai décidé de ne pas l’inclure dans la présente étude.

Gravel (Re)89 constitue un autre cas limite : dans ce dossier, bien que la Commission municipale n’ait détecté aucun manquement déontologique de la part de la mairesse Lucie Gravel, l’instance décisionnelle trouve l’attitude de celle-ci regrettable, car une plus grande fermeté de sa part aurait évité les conflits à l’origine du dépôt de la plainte.

La Commission constate que la plainte déposée contre madame Gravel et toutes les difficultés qu’elle a vécues au sein du conseil démontrent de fortes dissensions. Plusieurs témoignages incluant le sien le confirment. Une telle situation est déplorable, alors que les membres d’un conseil municipal doivent agir uniquement dans l’intérêt des citoyens. Comme la Commission en a fait part à madame Gravel lors des audiences, elle l’encourage à exercer pleinement ses fonctions. Il est important qu’elle affirme son autorité en tant que chef du conseil municipal et qu’elle n’hésite pas à verbaliser son opinion. Le fait que madame Gravel ait eu peur de parler ou de critiquer certaines situations a d’ailleurs peut-être fait augmenter les tensions au sein du conseil municipal90.

Certes, les décideurs estiment que Lucie Gravel aurait pu mieux jouer son rôle de mairesse, mais le ton qu’ils ont utilisé pour l’exprimer, notamment avec le verbe « encourager », rend inappropriée l’inclusion du dossier dans la présente étude.

En conclusion, contrairement au groupe A, la composition du groupe B risque certainement de faire l’objet de contestations, car un reproche officieux demeure toujours matière à interprétation.  Un examen de deux cas limites permet de faire ressortir à la fois des arguments au soutien de leur inclusion dans le groupe B et des contre-arguments. De ce fait, cette différence de perception peut occasionner une altération des résultats du Tableau 2.

Lien de causalité

Selon Rangeon, l’étude de l’effectivité d’une norme à travers ses effets « indirects, seconds ou induits91 » comporte une faille d’ordre méthodologique susceptible d’entraîner des erreurs dans l’établissement des relations causales :

La première [erreur] consiste à prendre la succession pour la cause : si tel comportement se produit immédiatement après l’adoption d’une loi, on a tendance à penser que la loi est la cause de ce comportement. Supposons que le nombre des avortements clandestins diminue (pour autant qu’on puisse le savoir) après l’adoption d’une loi sur l’interruption volontaire de grossesse, encore faut-il être en mesure d’établir une corrélation directe entre ces deux éléments92.

En somme, l’auteur met en garde contre les dangers d’automatiquement attribuer tout changement de conduite après l’entrée en vigueur de la norme examinée aux effets de celle-ci. Or, la mesure de l’effectivité implique une recherche d’un rapport de causalité entre la règle de droit et le phénomène observé. En l’occurrence, expliquer la défaite aux élections municipales de la Paroisse de Sainte-Séraphine d’André Moreau en 2013 seulement par la réprimande que la Commission municipale a prononcée à son égard l’année précédente constituerait effectivement un écart aux exigences méthodologiques commandées par l’étude d’effectivité. Cependant, en augmentant le nombre de sujets d’étude par la recension de l’évolution de la carrière politique des élus réprimandés au sens de la loi ou officieusement sur une période de quatre ans (entre 2012 à 2016) plutôt que d’examiner un seul cas, le lien de corrélation devient plus clair et précis. Certes, cet exercice aurait bénéficié par ailleurs d’un plus grand nombre d’individus dans le groupe A et dans le groupe B, mais il faudra attendre au moins jusqu’en 2021 pour l’obtention des données supplémentaires.

À la lumière de ce qui précède, en raison de la longue période couverte par la présente étude, les résultats recueillis traduisent le lien de causalité qu’exige une conclusion affirmant l’effectivité d’une règle juridique mieux que l’analyse de quelques cas isolés apparus tout de suite après l’entrée en vigueur de l’art. 31 LEDMM. Par contre, il faut admettre le potentiel de parfaire l’illustration de cette relation que présenterait l’opportunité de refaire l’exercice dans quelques années.

Effet de l’appartenance d’un élu municipal à un parti politique

Plusieurs publications attestent de la considération importante que les citoyens, au moment de voter, accordent aux partis politiques auxquels appartiennent les candidats éligibles93. De surcroît, plusieurs études constatent une forme de mentalité qui se rapproche de l’utilitarisme chez les individus lors des élections. À cet effet, les auteurs de Sousa et Moriconi font état d’un dilemme dans la tête de l’électeur qui doit choisir entre voter pour un politicien corrompu mais membre de son parti politique préféré et assister à l’ascension au pouvoir d’un candidat qui ne partage pas ses intérêts et ses convictions. De cette manière, malgré leur aversion pour l’inconduite du politicien en question, les citoyens hésitent à le déchoir uniquement sur ce motif94.

Ce projet n’a pas tenu compte de l’appartenance à un parti politique municipal des membres du groupe A et groupe B : ces derniers regroupent au total seulement 13 personnes.  En conséquence, les répartir dans de plus petits sous-groupes en fonction de leurs associations politiques respectives réduirait la taille des groupes d’individus à l’étude de manière à rendre le calcul du taux de réélection futile, car il deviendrait représentatif de quelques cas isolés seulement et non de l’effectivité réelle des réprimandes régulières et officieuses. Par contre, la méthodologie gagnerait certainement à distinguer les conseillers et les maires indépendants de leurs homologues membres d’un parti politique connu et à examiner la popularité de ce dernier dans une situation d’abondance de sujets d’étude.

Variation de la taille des conseils municipaux

Le dernier aspect à aborder sur la méthodologie de la présente étude porte sur l’effet de variation de la taille du conseil sur les résultats du Tableau 1 et du Tableau 2.  En l’occurrence, le calcul des taux de réélection des pairs dans les deux cas a tenu compte du nombre de sièges de chaque conseil dont un conseiller ou un maire a été touché par une réprimande entre 2012 et 2016. Or, puisque certains conseils municipaux admettent beaucoup plus de membres que d’autres, il aurait été tout aussi pertinent de déterminer cette proportion à partir de la moyenne des taux de réélection dans chaque municipalité aux élections suivant la prononciation de la réprimande à l’égard du membre du groupe A ou du groupe B en question ; tandis qu’en général 6 à 11 conseillers, en plus du maire, représentent chaque municipalité, les conseils de ville de Montréal et de Laval comptent respectivement 103 et 22 membres.

Tableau 3 : Pourcentages de réélection général dans les conseils municipaux des membres du groupe A cumulatif et pondéré

Pourcentage de réélection général dans les conseils municipaux des membres du groupe A cumulatif : 55, 0 %
Pourcentage de réélection général dans les conseils municipaux des membres du groupe A pondéré : 41,8 %

Tableau 4 : Pourcentages de réélection général dans les conseils municipaux des membres du groupe B cumulatif et pondéré

Pourcentage de réélection général dans les conseils municipaux des membres du groupe B cumulatif : 57, 8 %
Pourcentage de réélection général dans les conseils municipaux des membres du groupe B pondéré : 44,7 %

En conclusion, un réajustement de la manière de déterminer les taux de réélection généraux dans les conseils municipaux qui ne tiendrait pas compte de leur nombre de sièges n’affecte pas les résultats suffisamment pour remettre en question la justesse des prédictions. Néanmoins, cette alternative méthodologie entraîne des variations dans les pourcentages de réélection des pairs non-négligeables.

Conclusion

À la lumière de ce qui précède, pour retourner à la question principale, l’effectivité symbolique des réprimandes régulières et officieuses existe ; les données empiriques attestent de leur force dissuasive à l’égard des élus municipaux touchés par ce type de sanction tentés de postuler pour un mandat subséquent et de leur influence sur le choix des futurs conseillers et maires par le public. Or, la préoccupation de Lalonde n’en devient pas ainsi désuète. Les chiffres démontrent que cette effectivité n’est pas pour autant totale, car, malgré une volonté générale de punir les manquements au Code, les électeurs tiennent également compte, dans leur choix du prochain conseiller ou maire, des compétences des candidats, de leurs intérêts personnels et de la fiabilité des informations qui circulent sur les politiciens. La Commission municipale, grâce à la rigueur de ses méthodes d’enquête et à sa vigilance à l’égard des manœuvres employées pour discréditer une victime, procure au public une source d’informations de qualité sur l’intégrité des membres du conseil municipal. De ce fait, elle vient renforcer l’effectivité symbolique des réprimandes qu’elle prononce. Pour terminer, les résultats témoignent de l’effectivité supérieure des réprimandes régulières par rapport aux réprimandes officieuses : au regard des citoyens, ces dernières semblent moins graves, car elles se rapprochent davantage d’un acquittement que d’une condamnation réelle.

Pour terminer, il serait intéressant dans une prochaine étude sur le sujet d’explorer les manières d’incorporer les améliorations suggérées à la méthodologie afin de travailler avec des données plus représentatives de la réalité. Pour ce faire, il faudra attendre au moins quelques années de plus afin de laisser le temps à la Commission municipale de créer plus de cas à analyser. Pour l’instant, les données disponibles actuelles permettent toutefois d’élargir la portée du projet en y incluant les taux de réélection de l’ensemble des municipalités de la province aux élections de 2013 et de 2017. Cet ajout permettrait de comparer les résultats du Tableau 1 et du Tableau 2 avec des données qui reflètent la réalité de la vie politique municipale au Québec en tenant compte de la variation du caractère conflictuel d’un conseil à un autre et son effet sur les taux de réélection.

Bibliographie commentée

Législation

1. Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale, RLRQ, E-15.1.0.1
Commentaires : loi habilitant la Commission municipale du Québec à entendre les dossiers de plainte déontologique contre les élus municipaux et à leur imposer une sanction

Jurisprudence

2. Legresley (Re), 2016 CanLII 10275 (QC C.M.Q.)
Commentaires : décision comportant de l’information pertinente relative à l’objectif des sanctions prévues par l’art. 31 LEDMM

3. Moreau (Re), 2012 CanLII 81160 (QC C.M.Q.)
Commentaires : décision présentée par l’auteur Marc Lalonde quant à l’impuissance de la Commission à sanctionner un manquement aux valeurs du Code d’éthique et de déontologie

4. Moreau (Re), 2012 CanLII 82848 (QC C.M.Q.)
Commentaires : décision comportant de l’information pertinente relative à l’objectif des sanctions prévues par l’art. 31 LEDMM

Doctrine

5. BÉGIN, L., « L’illusion d’une exigence légale de réflexivité », dans Louise LALONDE (dir.), Le droit, vecteur de la gouvernance en santé ?, Sherbrooke, Les Éditions de la Revue de Droit de l’Université de Sherbrooke, p.109
Commentaires : texte doctrinal présentant le contexte de l’adoption de la LEDMM et ses finalités

6. CARBONNIER, J., « Effectivité et ineffectivité de la règle de droit » (1957) 9-3 L’Année sociologique 3
Commentaires : article décrivant les multiples sens de l’effectivité et de l’ineffectivité et de la différence entre ineffectivité juridique et ineffectivité sociologique. Discute aussi des effets des normes sur la conscience et des conséquences du flou juridique

7. DE SOUSA, L. et M. MORICONI, « Why voters do not throw the rascals out? A conceptual framework for analysing electoral punishment of corruption», (2013) 60-5 Crime, Law and Social Change 471
Commentaires: article recensant les études sur les raisons qui poussent les électeurs à continuer à voter pour un politicien accusé ou déclaré coupable de corruption. Les auteurs distinguent également les causes externes des motifs individuels des citoyens détenant le droit de vote

8. MUÑOZ, J., E. ANDUIZA et A. GALLEGO, « Why do voters forgive corrupt mayors? Implicit exchange, credibility of information, and clean alternatives », (2016) 42-4 Local Government Studies 598
Commentaires: article présentant les résultats d’une étude empirique sur la véracité de certaines théories visant à expliquer la réélection des maires espagnols accusés ou déclarés coupables de corruption (la transaction implicite, le manque d’informations crédibles et l’absence d’un successeur adéquat)

9. LALONDE, L., « Les ‘’lois éthiques’’, un défi pour le droit », (2011) 13-1 Éthique publique 117
Commentaires : article sur l’impact des valeurs adoptées en vertu des lois éthiques dans le droit québécois

10. LALONDE, M., « Éthique et déontologie : La commission municipale ne peut pas sanctionner le non-respect d’une valeur énoncée au code » (2013) 37-2 Le Carrefour 26
Commentaires : article à l’origine de la présente étude sur l’effectivité des réprimandes de la Commission dans lequel l’auteur met à l’attention du public l’incapacité de la Commission à sanctionner les manquements aux valeurs du Code d’éthique et de déontologie et la possibilité pour le décideur de se prononcer quant à caractère répréhensible de l’acte sans imposer de mesures punitives

11. LASCOUMES, P. et E. SERVERIN, « Théories et pratiques de l’effectivité du droit », (1986) 2 Droit et société 101
Commentaires : article expliquant des manières différentes de mesurer l’effectivité comme examiner le taux de connaissance, le taux de résistance (par une approche comportementale, culturelle ou socio-politique) ou l’instance de contrôle (dans les sanctions dans les lois à caractère répressif). Aide à situer la présente recherche dans la vastitude de l’étude sociologique de l’effectivité. Montre la possibilité d’évaluer la gravité d’une sanction par son exclusion, son insignifiance et sa visibilité

12. LEMMENICIER, B. et P. DURAISAMY, Who is really corrupt : voters or politicians ?, article inédit, Paris, Institut de Recherche sur la Gouvernance et l’Économie des Institutions, Université de Pantheon-Assas Paris II, 2011, p. 1-3
Commentaires : article présentant les résultats d’une étude empirique sur les probabilités de réélection chez les maires accusés, déclarés coupables de corruption ou acquittés en France et sur les probabilités qu’ils se retirent de la vie politique volontairement

13. LEROY, Y., « La notion d’effectivité du droit », (2011) 79 Droit et société 715
Commentaires : article décrivant les multiples paradigmes influençant l’étude d’effectivité des normes. Par exemple, une norme peut paraître ineffective selon le paradigme kelsenien mais se révéler très effective selon d’autres paradigmes. Montre le point de vue de divers auteurs sur les facteurs d’effectivité (Rocher, Rangeon, Demers, lui-même, etc.)

14. RANGEON, F., « Réflexions sur l’effectivité du droit », dans LOCHAK, D. et al, Les usages sociaux du droit, Paris, Presses universitaires de France, 1989
Commentaires : texte doctrinal fournissant un apport pertinent à ma recherche sur le volet symbolique de l’effectivité juridique

15. ST-JACQUES, J., « Cadre légal du contrat municipal », dans JurisClasseur Québec, coll. « Droit municipal », Règles générales, fasc. 15, Montréal, LexisNexis Canada, à jour le 5 mars 2015, no2 (LN/QL)
Commentaires : texte expliquant le fonctionnement de la Commission municipale du Québec devant un dossier de plainte déontologique à l’égard d’un élu municipal en vertu de la LEDMM

Statistiques officielles

16. MINISTÈRE DES AFFAIRES MUNICIPALES ET DE L’HABITION, Démocratie municipale, Archives des résultats des élections municipales, Québec, 2017.
Commentaires : Statistiques officielles sur les résultats des élections municipales au Québec classées par le nom des municipalités et par année électorale

Notes

1Marc LALONDE, « Éthique et déontologie : La commission municipale ne peut pas sanctionner le non-respect d’une valeur énoncée au code », (2013) 37-2 Le Carrefour 26.
2 Moreau (Re), 2012 CanLII 81160 (QC C.M.Q.).
3 Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale, RLRQ, c. E-15. 1. 0 .1 (ci-après « LEDMM »).
4 Moreau (Re), préc., note 2, par. 64.
5Jean CARBONNIER, « Effectivité et ineffectivité de la règle de droit », (1957) 9-3 L’Année sociologique 3, 3.
6 Yann LEROY, « La notion d’effectivité du droit », (2011) 79 Droit et société 715, par. 14 et 22. Selon la conception classique de l’effectivité, cette dernière s’évalue en mesurant le degré d’adéquation entre la norme et le comportement des destinataires de celle-ci.
7 CARBONNIER, J., préc., note 5. Dans cet article, Carbonnier présente les multiples différents sens que l’effectivité et l’ineffectivité peuvent prendre.
8 Yann LEROY, préc., note 6, par. 30 et par. 33. Bien que d’autres auteurs comme Rocher aient présenté un point de vue différent à cet égard, pour les fins du présent travail, je retiendrais la thèse de Leroy que je trouve plus compatible avec la nature des données empiriques que je vais récolter et avec mon objectif de comprendre la gravité des conséquences d’une réprimande formulée par la Commission municipale du Québec.
9 Luc Bégin, « L’illusion d’une exigence légale de réflexivité », dans Louise LALONDE (dir.), Le droit, vecteur de la gouvernance en santé ?, Sherbrooke, Les Éditions de la Revue de Droit de l’Université de Sherbrooke, p.109, à la page 109.
10 Cependant, dans le cas d’un changement de district ou de fonction (un maire qui devient un conseiller et vice-versa), l’individu sera considéré comme réélu.
11 MINISTÈRE DES AFFAIRES MUNICIPALES ET DE L’HABITATION, Démocratie municipale, Archives des résultats des élections municipales, Québec, 2017.
12 Pierre LASCOUMES et Evelyne SERVERIN, « Théories et pratiques de l’effectivité du droit », (1986) 2 Droit et société 101, 110.
13 Id., 114-117.
14 LEROY, Y., préc., note 8, par. 26 et par. 27.
15 Id., par. 27
16 La visibilité d’une sanction constitue un indice quant au degré d’effectivité d’une norme selon Lascoumes et Serverin.
17 Veilleux (Re), 2013 CanLII 31476 (QC C.M.Q.).
18 VILLE DE BEAUCEVILLE, Séance extraordinaire du 12 juillet 2012, Procès-verbal, Beauceville, p. 1 et 2.
19 Veilleux (Re), préc, note 17, par. 79-62.
20 Id., par. 79-85.
21 MINISTÈRE DES AFFAIRES MUNICIPALES ET DE L’HABITATION, Candidatures et résultats pour Beauceville, Élections municipales 2017 - Résultats des élections pour les postes de maire et de conseiller, Québec, 2017.
22 Luc BÉGIN, préc., note 9, à la page 109 ; Daniel CHÉNARD, « L’expectative légitime : le respect de la parole donnée et la gouvernance municipale », Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 331, Développements récents en droit municipal (2011), Cowansville, Éditions Yvon Blais, p. 79, à la page 92.
23 BÉGIN, L., préc., note 9, à la page 109.
24 Code d’éthique et de déontologie des membres de l’Assemblée nationale, RLRQ, c. C-23.1.
25 Louise LALONDE, « Les ‘’lois éthiques’’, un défi pour le droit », 13-1 (2011) Éthique publique 117, no 9.
26 Id., no 9 et 11.
27 Id., no 8.
28 Id., no 12, 30, 31 et 43.
29 Id., no 9.
30 Id.
31 Celle-ci demeure toutefois pertinente dans la recherche de l’objectif général de la LEDMM.
32 Legresley (Re), 2016 CanLII 10275 (QC C.M.Q.).
33 Id., par. 50-54.
34 Moreau (Re), 2012 CanLII 82848 (QC C.M.Q.).
35 Id., par. 64.
36 LEROY, Y., préc., note 6, n5.
37 Id., n13-15. CARBONNIER, J., préc., note 5, 6-7.
38 LEROY, Y., préc., note 6, n16.
39 Id., n13-15.
40 Id., n24 ; François OST et Michel VAN DE KERCHOVE, De la pyramide au réseau. Pour une théorie dialectique du droit, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, 2002, p. 330.
41 LEROY, Y., préc., note 6, n24.
42 Id.
43 Id., n25.
44 Id., n38.
45 Id., n15.
46 François RANGEON, « Réflexions sur l’effectivité du droit », dans Danièle LOCHAK et al., Les usages sociaux du droit, Paris, Presses universitaires de France, 1989, aux pages 137 et 145.
47 Id., aux pages 135, 140 et 141.
48 Id., à la page 139.
49 Id., à la page 145.
50 LEROY, Y., préc., note 6, n33, 34 et 35.
51 Id., n38.
52 CARBONNIER, J., préc., note 5, 7.
53 Cette appellation découle de l’hésitation à considérer les citoyens détenant le droit de vote comme étant de réels destinataires secondaires étant donné qu’ils ne constituent pas des « autorités ». De plus, contrairement aux juges et aux décideurs administratifs, les électeurs exercent leur pouvoir de sanction sans aucune contrainte. Cependant, compte tenu de l’objectif des sanctions prévues à l’art. 31 LEDMM de restaurer la confiance du public envers la politique municipale, il y a un rapprochement à faire entre les citoyens et leur qualité de destinataires de la norme.
54 RANGEON, F., préc, note 46, à la page 139.
55 Id.
56 Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, RLRQ, E-2.2, art. 300-309. Dans certains cas prévus par cette loi, certains motifs permettent à la Cour supérieure de déclarer un élu municipal inhabile à siéger au conseil municipal, mais une réprimande régulière ou officieuse par elle-même n’entraîne pas cet effet.
57 Carbonnier, J., préc., note 5, 7.
58 Id., 15.
59 Luís DE SOUSA et Marcelo MORICONI, « Why voters do not throw the rascals out? A conceptual framework for analysing electoral punishment of corruption », (2013) 60-5 Crime, Law and Social Change 471, 472 ; Bertrand LEMMENICIER et Palanigounder DURAISAMY, Who is really corrupt: voters or politicians ?, article inédit, Paris, Institut de Recherche sur la Gouvernance et l’Économie des Institutions, Université de Pantheon-Assas Paris II, 2011, p. 1-3 ; Jordi MUÑOZ, Eva ANDUIZA et Aina GALLEGO, « Why do voters forgive corrupt mayors? Implicit exchange, credibility of information, and clean alternatives », (2016) 42-4 Local Government Studies 598, 598-599.
60 Marcel GARZ et Jil SÖRENSEN, « Politicians under investigation: The news Media's effect on the likelihood of resignation », (2017) 153 Journal of Public Economics 82, 83.
61 MUÑOZ, J., E. ANDUIZA et A. GALLEGO, préc., note 59, 599 et 603.
62 DE SOUSA, L. et M. MORICONI préc., note 59, 472.
63 Matthew S. WINTERS and Rebecca WEITZ-SHAPIRO, «Lacking Information or Condoning Corruption When Do Voters Support Corrupt Politicians?», (2013) 45-4 Comparative Politics 418, 425.
64 LEMMENICIER, B. et P. DURAISAMY, préc., note 59, p. 14.
65 DE SOUSA, L. et M. MORICONI, préc., note 59, 474.
66 Cet article ne développera pas sur la capacité à assimiler les informations sur l’actualité politique étant donné que la méthodologie retenue n’inclut pas le tri des données recueillies en fonction du niveau de connaissance des électeurs.
67 La plupart des publications citées dans la présente partie de la Discussion étudie des cas de corruption chez les politiciens municipaux tandis que les réprimandes que la Commission municipale prononce à l’égard d’un élu peuvent porter sur d’autres sortes de méfaits. Cependant, ces articles demeurent pertinents, car le raisonnement qu’ils proposent au sujet des conséquences sur les élections subséquentes explique bien les résultats obtenus dans les Tableau 1 et Tableau 2.
68 MUÑOZ, J., E. ANDUIZA et A. GALLEGO, préc., note 59, 603-604.
69 Id. Cette transaction désigne l’acceptation des citoyens à substituer un politicien honnête par un remplaçant plus compétent malgré son manque d’intégrité.
70 Id., 603-604 et 609.
71DE SOUSA, L. et M. MORICONI, préc., note 59, 493.
72 LEMMENICIER, B. et P. DURAISAMY, préc., note 59, p. 16. Le sujet de l’adhésion à un parti fait l’objet d’un examen plus approfondi dans la section suivante.
73 Id.
74 DE SOUSA, L. et M. MORICONI, préc., note 59, 486-487.
75 GARZ, M. et J. SÖRENSEN, préc., note 60, 91.
76 DE SOUSA, L. et M. MORICONI, préc., note 59, 488.
77 MUÑOZ, J., E. ANDUIZA et A. GALLEGO, préc., note 59, 604, 609 et 612.
78 DE SOUSA, L. et M. MORICONI préc., note 59, 480.
79 Id., 489-490.
80 Id.
81 Les décisions portant sur les ordonnances de non-divulgation ou de non-publication et sur les demandes préliminaires, tout comme celles qui visent à apporter des corrections mineures dans un dossier précédent, font partie des exceptions.
82 Moreau (Re), 2012 CanLII 81160, préc., note 2, par. 37-45.
83 Benedetti (Re), 2013 CanLII 9284 (QC C.M.Q.), par. 49.
84 LEMMENICIER, B. et P. DURAISAMY, préc., note 59, p. 9 et 19.
85 Lalande (Re), 2016 CanLII 6482 (QC C.M.Q.).
86 Id., par. 75.
87 Id., par. 38.
88 Id., par. 94.
89 Gravel (Re), 2016 CanLII 85152 (QC C.M.Q.).
90 Id., par. 109-111.
91 RANGEON, F., préc., note 46, à la page 140.
92 Id.
93 LEMMENICIER, B. et P. DURAISAMY, préc., note 59, p. 16 ; DE SOUSA, L. et MORICONI, M., préc., note 59, 490.
94 DE SOUSA, L. et M. MORICONI préc., note 59, 490.