Hypothèque sur domaine à bail et protection du prêteur

La trousse d’instructions hypothécaires procure des conseils pratiques aux avocats qui répondent aux demandes du prêteur lors de transactions immobilières résidentielles. Cette page porte sur l’hypothèque sur domaine à bail et la protection du prêteur.

La situation

Le propriétaire d’une maison n’est pas forcément celui du bien-fonds où elle se trouve; ce dernier lui est parfois loué. Quant à lui, le propriétaire du bien-fonds (le bailleur foncier) peut être une entité publique (municipal, provincial ou fédéral), une société d’État, une Première nation, une société par actions ou toute autre personne.

Il se peut que le propriétaire ou l’acquéreur de la maison (le locataire foncier) obtienne un prêt hypothécaire en donnant en garantie le domaine à bail si la durée à courir du bail satisfait aux critères de souscription du prêteur.

Dans un tel cas, le prêteur se montre précis dans ses instructions à l’avocat. Aussi pointues soient-elles, toutefois, celles-ci ne protègent pas nécessairement le prêteur comme il se doit.

Ainsi, à titre de conseiller juridique du prêteur pour la passation de l’hypothèque sur domaine à bail, vous devez envisager d’aller au-delà des instructions du prêteur. À défaut, vous pourriez engager votre responsabilité pour avoir fourni à votre client des services en deçà de la norme prescrite.

Modèle d’instructions du prêteur

En cas d’hypothèque sur domaine à bail ne portant pas sur les terres d’une Première Nation, il vous incombe d’obtenir une copie du bail pour vous assurer que l’échéance de celui-ci dépasse la fin de la période d’amortissement de l’hypothèque d’au moins cinq ans. Vous devez aussi informer le créancier du montant des loyers et obtenir du propriétaire tous les consentements nécessaires, dont la signature du formulaire par lequel il convient d’aviser le créancier de tout manquement au bail, ainsi qu’une déclaration selon laquelle le bail est en règle.

Conseils pratiques

Outre l’examen de titres, qui valide le titre de propriété du bailleur et établit les droits dont le bail foncier peut faire l’objet, il y a lieu d’envisager de faire signer au prêteur et au bailleur foncier (le propriétaire) une convention comportant les clauses suivantes, et de faire publier ou inscrire celle-ci selon le cas :

  1. Le propriétaire doit remettre au prêteur une copie de tout avis qu’il envoie à l’emprunteur, et l’avis ne prendra effet qu’à ce moment.
  2. Advenant le défaut de l’emprunteur aux termes du bail, le propriétaire, à moins d’aviser le prêteur et d’accorder à l’emprunteur, pour remédier au défaut, un délai prenant fin après tout délai de grâce accordé par le prêteur :
    1. ne mettra pas fin au bail;
    2. ne reprendra pas possession de l’immeuble;
    3. ne se prévaudra de nul autre droit ou recours découlant d'une violation du bail.
    Ce qui précède ne s’applique pas aux défauts dont la remédiation relève exclusivement de l’emprunteur (p. ex., insolvabilité), auxquels le propriétaire devra par conséquent renoncer.
  3. Le prêteur doit consentir à la modification ou la résiliation consensuelle du bail, de même qu’à l’acceptation de son abandon.
  4. Si le propriétaire, l’emprunteur ou un syndic autorisé met fin au bail, le propriétaire doit aviser le prêteur et lui donner le temps de conclure un bail de substitution reprenant les modalités du bail résilié et dont la durée correspondra à la durée résiduelle de ce dernier.
  5. Le propriétaire doit accepter que le prêteur remédie à tout défaut de l’emprunteur et exerce l’un ou l’autre des droits de ce dernier aux termes du bail, notamment la communication d’avis, la prolongation ou le renouvellement du bail et l’exercice de tout droit de préemption (p. ex., un droit de premier refus) prévu au bail.
  6. En exerçant ses droits en vertu de la convention avec le propriétaire ou en vertu des documents de prêt, le prêteur ne saurait engager sa responsabilité aux termes du bail, à moins qu’il ait acquis le domaine à bail et l’occupe physiquement, ou encore qu’il ait expressément pris le bail en charge.
  7. Il est pleinement loisible au prêteur de céder le bail et de pénétrer dans le domaine à bail, et ce, même s’il n’a pas pris le bail en charge.
  8. Dans l’éventualité où il se serait porté acquéreur du domaine à bail, le prêteur ne sera responsable d’aucun événement ou défaut qui soit postérieur à sa cession du bail. Quelles que soient les circonstances, la responsabilité du prêteur se limite à son intérêt dans le domaine à bail.
  9. Ni le bail ni l’hypothèque sur domaine à bail du prêteur ne doivent être sujets ou subordonnés à une autre hypothèque ou garantie grevant le domaine en fief simple du propriétaire, ce que doivent expressément prévoir toute hypothèque ou garantie que consent le propriétaire.
  10. Si le prêteur se porte acquéreur du domaine à bail de l’emprunteur, le propriétaire doit le reconnaître juridiquement (c.-à-d. en s’attournant au prêteur).
  11. Le prêteur a le droit d’être désigné titulaire d’un prêt hypothécaire assuré et bénéficiaire prioritaire dans toute police d’assurance de biens. Il a par ailleurs le droit d’être partie à tout règlement et à toute procédure en matière d’assurance ou d’expropriation.
  12. Le prêteur peut en tout temps verser le loyer directement au propriétaire.
  13. Il est interdit de fusionner le domaine à bail et le domaine en fief simple.
  14. [Inclure les dispositions d’usage, dont les précisions sur la communication d’avis.]