Incidences des PDNU sur les relations juriste-client

i) Retrait du juriste

Le retrait du juriste est un ultime recours si un client n’est pas disposĂ© Ă  accepter des conseils juridiques sur les mesures nĂ©cessaires pour remĂ©dier Ă  des violations claires des droits de la personne ou n’est autrement pas disposĂ© Ă  prendre des mesures correctives conformĂ©ment aux PDNU 22-24.

Lorsqu’une relation juriste client est dĂ©jĂ  Ă©tablie, conformĂ©ment au commentaire de la règle 3.2-2 du Code type de la FOPJC, les discussions d’un juriste avec son client peuvent consister Ă  rĂ©examiner et Ă  clarifier les instructions du client dans le contexte de son intĂ©rĂŞt supĂ©rieur. Pour ce faire, il peut ĂŞtre nĂ©cessaire de s’inspirer des engagements externes pris par le client Ă  l’Ă©gard des normes internationales en matière de droits de la personne contenues dans ses publications, ses politiques ou son respect des normes de l’industrie.

En dernier recours, le Principe directeur 19 demande Ă  un juriste de mettre fin au mandat de reprĂ©sentation du client et de se retirer de la relation juriste client. Le commentaire du PDNU 19 exige que l’on examine l’importance de la relation juriste client et la « gravitĂ© » de l’atteinte aux droits de la personne. Il faudrait alors tenir compte des facteurs suivants :

  • Analyse de la gravitĂ© du prĂ©judice.
  • Caractère crucial de la relation pour l’entreprise.
  • Contraintes imposĂ©es par la loi ou le contrat sur la rĂ©siliation.
  • Incidences nĂ©gatives possibles sur les droits de la personne dĂ©coulant de la rĂ©siliation en soi du mandat de reprĂ©sentation.

Le retrait de la reprĂ©sentation d’un client est une mesure de dernier recours en vertu du Code type de la FOPJC et des PDNU, et nĂ©cessite une justification fondĂ©e sur des faits en vertu des deux codes. Un juriste peut se demander si choisir de demeurer dans la relation avec le client et de continuer Ă  le persuader de prĂ©venir et d’attĂ©nuer les incidences sur les droits de la personne peut mieux servir les objectifs des PDNU et les intĂ©rĂŞts de la justice que son retrait. L’AIB prĂ©cise que si un juriste dĂ©cide de demeurer dans la relation juriste client, il doit ĂŞtre prĂŞt Ă  dĂ©montrer ses efforts continus pour prĂ©venir ou attĂ©nuer le prĂ©judice et ĂŞtre prĂŞt Ă  accepter toute consĂ©quence juridique, financière ou d’atteinte Ă  la rĂ©putation, en notant que le retrait est très problĂ©matique si une relation est cruciale pour l’entreprise.

ii) Obligations de confidentialité et exceptions dans les situations où les droits de la personne sont en cause

La confidentialitĂ©, codifiĂ©e en vertu de la règle 3.3 du Code type de la FOPJC, est le fondement de toute relation juriste client.

En pratique, le maintien du secret professionnel de l’avocat est une source reconnue de tension avec les PDNU. Par exemple, le PDNU 21 envisage qu’un juriste interagisse ouvertement avec des intervenants externes ou communique la politique sur les droits de la personne d’un client. En gĂ©nĂ©ral, il est prĂ©fĂ©rable d’atteindre les objectifs des PDNU lorsque l’accent est mis sur la communication par le client de ses engagements en matière de droits de la personne conformĂ©ment aux exigences des PDNU.

L’obligation Ă©thique de confidentialitĂ© a une portĂ©e plus vaste que la règle de preuve du secret professionnel, bien que ce dernier soit protĂ©gĂ© par la Constitution en vertu de la Charte. Pour s’assurer que les conseils donnĂ©s Ă  un client sur le droit international en matière de droits de la personne sont assujettis aux critères les plus rigoureux de confidentialitĂ© dans le cadre du secret professionnel de l’avocat, un juriste qui prodigue des conseils sur le droit international en matière de droits de la personne doit exprimer son opinion comme un enjeu de conformitĂ© juridique conformĂ©ment au PDNU 23.

Exceptions Ă  la confidentialitĂ© — sĂ©curitĂ© publique

La règle 3.3-3 du Code type de la FOPJC prĂ©voit une exception en matière de sĂ©curitĂ© publique lorsqu’un juriste a des motifs raisonnables de croire qu’il existe un risque imminent de mort ou de lĂ©sions corporelles ou psychologiques graves. Dans la mesure oĂą ce prĂ©judice dĂ©coule d’une incidence nĂ©faste sur les droits de la personne (p. ex. des violations graves qui menacent le droit Ă  la vie d’une personne, l’interdiction de la torture ou de l’esclavage), un juriste peut avoir des motifs Ă©thiques pour empĂŞcher le prĂ©judice, mĂŞme lorsque la confidentialitĂ© du client peut ĂŞtre compromise.

Lorsqu’il y a un risque de violation grave des droits de la personne ou de contribution Ă  une telle violation, le juriste doit considĂ©rer le problème comme un grave problème de conformitĂ© juridique et chercher Ă  prĂ©venir le prĂ©judice en soi. Un retrait accessoire de la confidentialitĂ© peut ĂŞtre requis pour servir l’intĂ©rĂŞt supĂ©rieur du client en vertu des dispositions d’identification et de rĂ©paration du PDNU 22.

Lorsque la portĂ©e du prĂ©judice est moins immĂ©diate ou directe, le commentaire de la règle 3.3-3 3) du Code type de la FOPJC Ă©nonce trois facteurs pour lesquels la responsabilitĂ© professionnelle justifie le retrait de la confidentialitĂ© :

  • La probabilitĂ© que le prĂ©judice anticipĂ© se produise et qu’il soit imminent.
  • L’absence apparente de tout autre moyen rĂ©alisable de prĂ©venir le prĂ©judice potentiel.
  • Les circonstances dans lesquelles le juriste a acquis les renseignements.

Dans chaque cas de divulgation relative Ă  la sĂ©curitĂ© publique, le juriste devrait rĂ©diger une note au dossier dĂ©crivant les dĂ©tails d’une divulgation relative Ă  la sĂ©curitĂ© publique, ce qui peut prĂ©venir d’Ă©ventuelles allĂ©gations d’inconduite de la part du client.

Exceptions Ă  la confidentialitĂ© — rapports publics

Les divulgations publiques d’un client par l’entremise de ses pratiques de gouvernance d’entreprise ou d’un engagement public Ă  l’Ă©gard d’une pratique de production de rapports publics peuvent constituer une renonciation implicite Ă  une atteinte Ă  la confidentialitĂ©, surtout si cette information est dĂ©jĂ  du domaine public. Les entreprises font rĂ©gulièrement des dĂ©clarations en vertu des lois sur les valeurs mobilières, des codes de conduite sectoriels et des exigences relatives aux fonds d’investissement (p. ex. rapports ESG). Ainsi, le droit canadien des valeurs mobilières exige que les sociĂ©tĂ©s produisent rĂ©gulièrement des rapports externes en vertu d’obligations de divulgation continue prescrites par les règlements provinciaux sur les valeurs mobilières.

Les codes de conduite de l’industrie peuvent Ă©galement exiger des sociĂ©tĂ©s membres qu’elles fassent des divulgations pro forma ou autres divulgations pĂ©riodiques (p. ex. la Global Reporting Initiative). Les fonds d’investissement socialement responsables peuvent Ă©galement imposer des obligations de dĂ©claration aux organisations clientes. Ils peuvent Ă©galement s’attendre Ă  ce que les clients prennent des mesures visibles pour donner suite aux allĂ©gations nĂ©gatives en lien avec les droits de la personne afin d’Ă©viter le dessaisissement, ce qui entraĂ®ne des consĂ©quences financières et d’atteinte Ă  la rĂ©putation graves et Ă  long terme.

Un juriste qui Ă©labore un plan de pondĂ©ration entre les PDNU et les exigences de confidentialitĂ© en vertu du Code type de la FOPJC doit d’abord Ă©valuer les renseignements qui sont dĂ©jĂ  du domaine public avant d’invoquer le secret professionnel de l’avocat. Les juristes devraient savoir quand leur mandat peut nĂ©cessiter un engagement direct et ouvert avec des intervenants externes, comme le prĂ©voit le PDNU 21.