Un petit cabinet peut-il envisager l’externalisation de services?

  • 24 juin 2014
  • Arthur Greene

L’externalisation Ă©tait jadis vue comme une stratĂ©gie innovatrice pour les cabinets juridiques. Nous nous souvenons tous de la première fois : pour moi, il s’agit d’un service d’appel pour une petite entreprise. « Je ne connais pas l’horaire de l’avocat; ceci est un service d’appel. » Imaginez ça : la personne qui prend les messages travaille hors du bureau.

Ces jours-ci, la presse juridique met l’accent sur l’impartition Ă  l’Ă©tranger. Cela pose la question : y a-t-il ici une mutation profonde? L’externalisation constitue-t-elle l’avenir de notre profession, ou sommes-nous toujours Ă  l’Ă©tape expĂ©rimentale avec des rĂ©sultats suspects?

Quelle que soit la rĂ©ponse, comment l’externalisation peut-elle s’appliquer au travail d’un petit cabinet ou de l’avocat exerçant seul? Peuvent-ils bĂ©nĂ©ficier de l’impartition, ici ou ailleurs?

Externalisation de tâches administratives

En dĂ©pit des manchettes, vous n’avez pas besoin de personnel en Inde pour externaliser vos services administratifs. La plupart des petites entreprises ont probablement imparti une partie de leurs travaux administratifs. Par exemple :

  • le service de la paie - La plupart des petites entreprises confient Ă  une compagnie externe la gestion de la paie et des formulaires bureaucratiques complexes. C’est efficace et Ă©conomique.
  • la comptabilitĂ© - Les petites entreprises embauchent couramment des entrepreneurs indĂ©pendants, une ou deux journĂ©es par semaine, pour effectuer les travaux de comptabilitĂ©.
  • les services de messagerie - La plupart des petites entreprises ne peuvent se permettre d’embaucher un employĂ© qui peut quitter le bureau pour effectuer des livraisons. Parfois, les frais de messagerie peuvent ĂŞtre passĂ©s au client.
  • les services de photocopie - Pour les copies de grands documents de projets, utiliser un bureau 24/7. Encore une fois, ces coĂ»ts peuvent ĂŞtre transmis au client.
  • les services de TI - Les petites entreprises impartissent couramment leurs fonctions d’entretien informatique.
  • les services de stĂ©nographie - L’arrivĂ©e de la dictĂ©e numĂ©rique a permis aux avocats de recourir davantage aux entrepreneurs indĂ©pendants pour les services de transcription juridique. Certains avocats dictent tout au long de la journĂ©e et transmettent Ă©lectroniquement la dictĂ©e Ă  une personne Ă  l’externe, possĂ©dant des compĂ©tences en secrĂ©tariat. Le lendemain matin, la transcription complĂ©tĂ©e est arrivĂ©e dans le courrier entrant de l’avocat.

Tout petit cabinet devrait Ă©valuer son fonctionnement administratif et s’interroger sur l’efficacitĂ© ou les Ă©conomies de l’impartition de tâches administratives.

Externalisation de travaux juridiques

L’impartition de travaux de droit substantiel Ă  des avocats indĂ©pendants ou Ă  des techniciens juridiques devient de plus en plus frĂ©quente. Par exemple :

  • Services parajuridiques - En tant qu’avocat exerçant seul ou membre d’un petit cabinet, vous n’avez peut-ĂŞtre pas accès aux services de soutien d’un technicien juridique Ă  temps plein. Un technicien juridique Ă  l’externe peut rĂ©pondre Ă  vos besoins.
  • Avocats contractuels - Plusieurs petits cabinets embauchent des avocats sur une base contractuelle pour des travaux, la plupart du temps exĂ©cutĂ©s Ă  l’extĂ©rieur du bureau. L’idĂ©al, c’est de trouver des avocats contractuels ayant de l’expĂ©rience dans un champ spĂ©cialisĂ©, Ă©liminant la pĂ©riode d’apprentissage.

La non-disponibilitĂ© de personnel ou le besoin de flexibilitĂ© peuvent influencer les dĂ©cisions sur l’externalisation de travaux Ă  l’Ă©tranger. Il y aura, le cas Ă©chĂ©ant, un besoin accru de supervision si le cabinet n’a pas dĂ©veloppĂ© un lien de confiance avec le travailleur Ă©tranger.

Externalisation de services Ă  l’Ă©tranger

Impartir des services Ă  l’Ă©tranger, c’est un peu comme travailler avec un avocat embauchĂ© pour l’Ă©tĂ© ou avec un technicien juridique. Le personnel Ă©tranger n’est pas autoritĂ© Ă  travailler dans votre ressort, mais il peut exĂ©cuter des travaux de recherche juridique, organiser et rĂ©sumer des dossiers, et aussi prĂ©parer des formulaires et projets d’entente dans des affaires Ă  caractère rĂ©pĂ©titif. Ce personnel doit ĂŞtre supervisĂ© et tout travail doit ĂŞtre examinĂ© par l’avocat responsable du dossier. Le vĂ©ritable travail d’avocat doit demeurer ici.

Quand on sait que les avocats en Inde reçoivent 20 % ou moins du salaire d’un avocat salariĂ© au Canada ou aux États-Unis, les avantages financiers d’un tel arrangement sont Ă©vidents. MĂŞme si cela semble davantage l’exception que la règle, des avocats exerçant seuls ou en petit cabinet ont Ă©tabli des rapports efficaces avec des avocats ou techniciens juridiques en Inde.

Sauf pour l’Ă©loignement gĂ©ographique, plusieurs des mĂŞmes concepts de gestion s’appliquent : formation, mentorat, supervision, rĂ©troaction, etc. Des rapports semblables s’Ă©tablissent parfois au sein de cabinets d’avocats canadiens. Par exemple, il est dĂ©jĂ  arrivĂ© qu’un technicien juridique Ă  l’Ă©tranger qui ne faisait pas l’affaire soit remplacĂ© par un autre technicien juridique Ă  l’Ă©tranger, transformant ainsi une situation difficile en une relation fructueuse.

Mises en garde

Certaines mises en garde s’imposent Ă  ceux et celles qui songeraient Ă  externaliser des services Ă  l’Ă©tranger, notamment :

  • Il est communĂ©ment recommandĂ© de retenir les services d’un cabinet ayant un bureau local au Canada ou aux États-Unis.
  • Renseignez-vous sur le cabinet Ă  qui vous dĂ©sirez confier des travaux et obtenez des recommandations d’avocats en qui vous avez confiance.
  • Établissez des rapports avec le mĂŞme technicien juridique ou avocat dans tous vos projets, afin de crĂ©er un lien de confiance entre l’un et l’autre.
  • Accordez la prioritĂ© Ă  la confidentialitĂ©. Ne dĂ©voilez pas le nom du client sans ĂŞtre bien conscient des risques.
  • Surveillez de plus près les travaux de votre personnel Ă  l’Ă©tranger.
  • Ne mettez pas en pĂ©ril le secret professionnel.
  • Assurez-vous d’avoir une permission Ă©clairĂ©e de votre client.

Conclusion

L’impartition de certaines fonctions administratives peut ĂŞtre avantageuse pour la plupart des petits cabinets et des praticiens exerçant seuls. Les avantages sont moins clairs pour l’externalisation de travaux juridiques substantiels, au pays comme Ă  l’Ă©tranger. L’argument Ă©conomique est contrebalancĂ© par les dĂ©fis logistiques et les risques. Et l’impartition Ă  l’Ă©tranger peut ajouter une tranche de complexitĂ© que la plupart des petits cabinets ne voudront ou ne pourront pas tolĂ©rer.

En Ă©valuant les possibilitĂ©s d’impartition Ă  l’Ă©tranger, le petit cabinet ou l’avocat exerçant seul doit comprendre que cela ne rĂ©glera pas les problèmes d’inefficacitĂ© au bureau. Seul l’avocat bien organisĂ©, au sommet de son art, pourra tirer efficacement les avantages de l’impartition Ă  l’Ă©tranger. Une dernière pensĂ©e : la plupart des avocats ne seront pas Ă  l’aise avec la possibilitĂ© d’externaliser des travaux Ă  l’Ă©tranger. S’il s’agit d’une dĂ©cision qui vous rend mal Ă  l’aise, ne le faites pas.

Directeur d’un groupe-conseil de cabinets juridiques, Boyer Greene, s.r.l., Arthur G. Greene est membre du conseil d’administration du College of Law Practice Management. Son plus rĂ©cent livre, The Lawyer’s Guide to Governance, a Ă©tĂ© publiĂ© en 2009.