Augmenter le contingent des versements aux organismes de bienfaisance n’est pas la solution

  • 20 aoĂ»t 2021

La Section des organismes de bienfaisance et Ă  but non lucratif de l’Association du Barreau canadien s’inquiète de la possible augmentation du montant minimum qu’une Ĺ“uvre de bienfaisance enregistrĂ©e doit consacrer Ă  ses activitĂ©s caritatives, car cela compliquerait la planification de ses investissements et ferait planer un risque sur sa pĂ©rennitĂ© financière.

Dans une lettre Ă  la vice-première ministre et ministre des Finances Chrystia Freeland (lettre disponible uniquement en anglais, toutes les citations qui en sont tirĂ©es sont des traductions), la section est d’avis que majorer le contingent des versements et muscler les leviers lĂ©gaux de l’Agence du revenu du Canada, solution que l’on propose d’Ă©tudier par des consultations publiques dans le budget fĂ©dĂ©ral de 2021, crĂ©erait des difficultĂ©s pour de nombreux organismes de bienfaisance.

Le contingent des versements, c’est le pourcentage des dons qu’un organisme de bienfaisance enregistrĂ© doit dĂ©penser pour ses programmes ou services caritatifs chaque annĂ©e – ce qui comprend les cadeaux aux autres Ĺ“uvres caritatives. Le montant est calculĂ© Ă  partir de la valeur des biens de l’organisme que celui-ci n’utilise pas pour mener ou administrer ses activitĂ©s caritatives. Ce contingent est actuellement fixĂ© Ă  3,5 % de la valeur moyenne de ses biens.

Jusqu’en 2004, ce taux Ă©tait de 4,5 % et, comme le souligne la section, les Ĺ“uvres caritatives avaient du mal Ă  atteindre ce seuil. Cette annĂ©e-lĂ , dans le budget fĂ©dĂ©ral, ce pourcentage fut revu Ă  la baisse pour mieux reflĂ©ter les taux de rendement rĂ©els Ă  long terme du type de portefeuille de placements que dĂ©tiennent la plupart des organismes de bienfaisance enregistrĂ©s.

En 2004, on jugeait que 4,5 %, c’Ă©tait trop, compte tenu des rendements dans un contexte oĂą le taux officiel d’escompte se situait Ă  2,25 %. Aujourd’hui, ce taux est Ă  un demi pour cent! Avec un taux aussi faible, la section estime qu’augmenter le contingent des versements n’est pas une bonne idĂ©e.

DĂ©penses en immobilisations

La section fait observer que majorer le contingent des versements risque d’obliger les organismes de bienfaisance Ă  dĂ©penser en puisant dans leur capital en plus de leurs intĂ©rĂŞts et dividendes. Cela poserait un problème financier aux organismes dont les dĂ©penses sont restreintes aux intĂ©rĂŞts et dividendes. La section est claire : « Les immobilisations, qui comprennent les gains en capital, ne sauraient ĂŞtre mises Ă  contribution pour des dĂ©penses, car il s’agit de fonds fiduciaires dont la loi interdit l’utilisation, qui constituerait un empiĂ©tement sur le capital et une violation de fiducie. »

Les organismes seraient ainsi forcĂ©s de demander aux tribunaux de modifier leurs modalitĂ©s fiduciaires de façon Ă  pouvoir affecter leurs immobilisations et gains en capital Ă  leurs dĂ©penses. Ces procĂ©dures coĂ»teraient cher. « MĂŞme le processus simplifiĂ© Ă©vitant les requĂŞtes judiciaires, offert dans certaines provinces, dont l’Ontario, n’est pas sans difficultĂ© et les modifications permises sont strictement limitĂ©es », prĂ©cise la section dans sa lettre.

Planification de l’avenir

Les organismes de bienfaisance doivent ĂŞtre en mesure de maintenir leurs actifs Ă  long terme. Ils en ont besoin pour continuer d’offrir des programmes et services caritatifs, mais aussi pour remplir leur mission auprès des donateurs qui leur baillent des fonds qu’il s’agit de faire fructifier Ă  long terme.

« Les organismes de bienfaisance peuvent difficilement planifier leur avenir sans savoir s’ils disposeront de fonds annuels, et dans quelle mesure le cas Ă©chĂ©ant, pour financer leurs programmes actuels et futurs », fait valoir la section dans sa lettre. Ils doivent ĂŞtre en mesure d’investir leurs deniers prudemment, de façon Ă  dĂ©tenir assez d’actifs pour pourvoir Ă  leurs activitĂ©s futures. Les taux d’intĂ©rĂŞt Ă©tant très faibles actuellement, majorer le contingent des versements serait dĂ©savantageux pour le secteur caritatif et l’intĂ©rĂŞt public.