L’exigence relative à l’« emploi » aux fins d’enregistrement de marques de commerce ne requiert aucune correction

  • 19 juin 2017

Dans une lettre (disponible uniquement en anglais) adressée à Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), la Section nationale de l’ABC de la propriété intellectuelle relève que les modifications apportées en 2014 à la Loi sur les marques de commerce – même si elles n’ont pas encore été pleinement mises en vigueur – ont déjà favorisé les squatteurs de marques et un excès de revendications, donnant lieu à une augmentation de 75 pour cent du nombre des demandes canadiennes en attente d’enregistrement, qui sont passées de 40 000 en 2014 à près de 70 000.

[TRADUCTION] « Nous sommes d’avis qu’un grand nombre des marques faisant l’objet de ces demandes en instance seraient déjà enregistrées, si ce n’était de l’exigence actuelle de production d’une déclaration d’emploi », a déclaré la section.

Lorsque le gouvernement fédéral avait annoncé, en 2014, des modifications aux exigences relatives à l’emploi prévues par la Loi sur les marques de commerce en les incorporant – sans consultation préalable – dans un projet de loi omnibus, la section avait affirmé par écrit : « Les modifications proposées causeront des problèmes si graves que nous recommandons de les supprimer du projet de loi C-31 et de les soumettre à de plus amples consultations. »

Selon la section, non seulement il n’existait « aucune raison d’intérêt public » pour ces modifications, mais encore elles auraient des incidences négatives pour les entreprises canadiennes.

En 2016, la Section a réitéré ses préoccupations (lettre disponible uniquement en anglais) au sujet des modifications, faisant état de sa recommandation [traduction] « qu’elles soient abrogées ou qu’elles ne soient pas mises en vigueur avant la tenue d’autres consultations. »

En janvier dernier, la section a rencontré les équipes responsables des politiques en matière de propriété intellectuelle d’ISDE et du ministère du Patrimoine canadien, afin de discuter de plusieurs enjeux, dont celui des modifications à l’exigence relative à l’emploi de marques de commerce. Au mois de mai, la présidente de la section, Kamleh Nicola, a fait suite à ces discussions dans une lettre qui faisait une nouvelle fois état de l’argument de l’ABC contre la mise en vigueur des modifications.

Cette lettre déclare: [TRADUCTION] « Nous bénéficions tous lorsqu’un système est efficace et en harmonie avec nos partenaires commerciaux, et lorsqu’il réduit les barrières à l’entrée et accorde des prérogatives de mise en œuvre à la fois judicieux et équitables. ». Le texte poursuit  : « La Section de la propriété intellectuelle de l’ABC a soigneusement examiné les raisons évoquées pour justifier l’élimination de l’exigence d’emploi; nous continuons cependant de craindre que les coûts et les fardeaux qu’entraînera le projet de loi C-31 dépasseront de loin tout avantage que celui-ci pourrait procurer. Avant que ne soit mise en œuvre cette modification profonde de notre cadre réglementaire en matière de marques de commerce, nous recommandons une élaboration plus poussée de la politique concernée. »

Selon la section, les obligations qui découlent des traités internationaux conclus par le Canada ne lui imposent pas de laisser tomber la déclaration d’emploi à titre de condition préalable à l’enregistrement d’une marque de commerce, les États-Unis continuent à l’imposer, et l’abandon de cette exigence en Europe y a donné lieu à des problèmes d’encombrement.

La lettre dit : [TRADUCTION] « Diverses utilisations abusives sont possibles avec tout système de marques de commerce. Dans les cas les plus extrêmes, il s’agit de "chasseurs" ou de "squatteurs" de marques qui s’approprient, en toute connaissance de cause, les marques qui appartiennent à d’autres. [...] Un problème plus courant se pose lorsque des entités enregistrent des marques de commerce pour une gamme de produits et de services beaucoup plus étendue que la gamme qu’elles emploient réellement ou qu’elles avaient pu raisonnablement prévoir employer », une approche que ces entités adoptent parfois à titre de « stratégie délibérée visant à faire obstacle à la concurrence. »

La section ajoute que, si le gouvernement allait de l’avant et éliminait l’exigence de la production d’une déclaration d’emploi, d’autres révisions de la Loi s’imposeraient afin de créer des sauvegardes, dont la modification de l’article 30 de sorte à prévoir l’exigence expresse d’une véritable intention d’emploi, et la modification des articles 19 et 20 afin de n’autoriser des procédures visant à faire respecter une marque de commerce que lorsque la marque concernée a été employée au Canada.

« Le ministre et les hauts fonctionnaires de l’ISDE ont recueilli des témoignages de la Section de la propriété intellectuelle de l’ABC ainsi que de nos homologues de l’American Bar Association, de différents juristes dans l’ensemble du Canada, d’autres organisations professionnelles et de plusieurs chambres de commerce, et tous font état de vives préoccupations au sujet du projet de loi C-31. », conclut la section. « Nous demandons à l’ISDE de remettre à plus tard la pleine mise en œuvre de la section 25 de la partie 6 du projet de loi C-31, afin que tous les intervenants concernés puissent avoir l’occasion d’étudier en profondeur les différentes options politiques en matière de marques de commerce qui permettront de concrétiser notre objectif commun, celui d’un système canadien de marques de commerce qui sera efficace et judicieux. »

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