Une offre d’asile ne se limite pas à l’ouverture des frontières

  • 15 novembre 2017

Un bon hôte veille à ce qu’il y ait suffisamment à manger et à boire et d’autres éléments de confort afin que tous ceux qui sont invités à la fête se sentent bien accueillis et à l’aise. Le Canada risque de devenir un mauvais hôte pour les derniers arrivés à ses frontières.

Un flux constant de demandeurs d’asile traverse la frontière entre les États-Unis et le Canada depuis l’hiver dernier, en raison de l’atmosphère hostile en sol américain et de l’annonce du premier ministre (disponible uniquement en anglais) en janvier qu’ils seraient les bienvenus au Canada.

Aussi sincère soit le Canada dans sa volonté d’accueillir en son sol ceux qui fuient la guerre et la persécution dans leurs pays d’origine, le fait est que l’infrastructure ministérielle n’était déjà pas à même de traiter le nombre de demandes d’immigration régulières, et ce, avant la charge occasionnée par l’afflux des arrivées irrégulières des dix derniers mois – la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la Commission) prévoit recevoir 40 000 nouvelles demandes d’asile d’ici la fin de 2017. Le Canada est maintenant confronté au défi de trouver un juste équilibre entre veiller à l’intégrité de sa frontière et à la sécurité des individus canadiens, et céder à l’élan humanitaire qui le pousse à tendre la main aux non-Canadiens qui ont besoin de protection.

La Section du droit de l’immigration de l’ABC (la Section) a déjà écrit une lettre (disponible uniquement en anglais) aux dirigeants d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, leur proposant différentes mesures politiques et législatives afin de résoudre le problème des demandeurs d’asile.

Il existe plusieurs facteurs clés, dont l’argent et une information exacte constituent les deux premiers. Un troisième serait d’éliminer certaines barrières qui freinent inutilement l’immigration (dont l’interdiction des demandes d’asile en vertu du programme de candidats des provinces) et de modifier la loi fédérale de manière à ce que les demandeurs d’asile qui – s’ils n’étaient pas des réfugiés – seraient admissibles dans une catégorie d’immigration économique, soient exemptés de l’obligation de se soumettre au processus de demande d’asile.

En premier lieu, il est essentiel d’obtenir un financement plus important. Les réductions des budgets d’aide juridique aux immigrants et aux réfugiés constituaient déjà un problème, et ont fait l’objet d’un mémoire antérieur (disponible uniquement en anglais). L’aide juridique est un facteur essentiel, mais ce n’est pas le seul service qui pourrait grandement bénéficier d’apports de fonds additionnels. La Section de la protection des réfugiés, qui peinait à donner suite à des milliers de dossiers en attente, pourrait utiliser l’argent pour nommer un plus grand nombre de décideurs de qualité qui permettraient un traitement des demandes équitable et efficace. En outre, le recours aux services d’experts spécialisés réduirait le nombre des demandes qui devront faire l’objet d’un nouvel examen, ce qui éviterait des dépenses inutiles au ministre, à la Commission et aux organismes d’aide juridique.

L’argent ne constitue cependant pas la seule solution. Le fait de fournir aux demandeurs d’asile des renseignements exacts quant aux options à leur disposition peut également permettre de gagner du temps et d’économiser des ressources.

Par exemple, la documentation qui est fournie actuellement aux demandeurs d’asile leur laisse entendre qu’ils ont droit à une aide juridique et à des services sociaux financés par le gouvernement alors qu’en réalité, s’ils disposent de leurs propres ressources, ils devront eux-mêmes engager les services d’un avocat. Il faudrait également les informer du fait qu’ils ont le droit de présenter une demande de permis de travail dès le moment où ils sont déclarés admissibles au statut d’immigrant.

La Section relève dans son mémoire que [TRADUCTION] « [c]ette information pourrait aider les demandeurs d’asile à comprendre qu’il existe d’autres options que celle de l’aide juridique, et qu’ils n’ont pas nécessairement besoin de s’en remettre à des services sociaux financés par le gouvernement pendant qu’ils attendent que leurs demandes passent devant la Commission. Elle pourrait également permettre de réduire le fardeau financier pesant sur l’aide juridique et d’autres services publics. »

Il faudrait aussi mener une campagne de communication afin de corriger les renseignements inexacts sur les perspectives de succès au sein du système d’asile canadien, et de diriger les candidats au statut de réfugié qui remplissent les conditions requises vers d’autres programmes pouvant servir de portes d’entrée au pays (tels que les programmes fédéraux de travailleurs qualifiés ou de travailleurs de métiers spécialisés, l’obtention de permis de travail en vertu d’accords de libre-échange, le programme Mobilité francophone, ou d’autres encore).

[TRADUCTION] « En comprenant mieux les lois et procédures canadiennes en matière d’asile, les demandeurs éventuels pourraient avoir davantage tendance à choisir des options mieux adaptées à leurs circonstances spécifiques. »

Par ailleurs, la présence d’avocats de garde bien formés aux bureaux d’accueil des réfugiés, qui offriraient gratuitement aux demandeurs d’asile des conseils quant aux chances réelles de voir leurs demandes acceptées et des informations sur d’autres programmes d’accès « pourrait éviter que ceux qui chercheraient à traverser la frontière de manière irrégulière ne prennent de décisions non éclairées et ne tentent de procéder avec des demandes d’asile sans fondement ».

Les mesures suivantes sont aussi du nombre de celles proposées par la Section :

  • Développer des possibilités d’emploi visant les travailleurs peu spécialisés et très demandés
  • Modifier les critères de l’Entrée Express de manière à accorder des points aux « Dreamers »
  • Permettre le traitement au Canada des dossiers d’immigration de personnes appartenant à la catégorie « regroupement familial »
  • Élargir les critères d’admission de réfugiés financièrement indépendants
  • Accroître les options de traitement de demandes permettant la prise de décisions à l’extérieur du Canada
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