Fitting in without selling out

S’intégrer sans renoncer à soi-même

  • 30 janvier 2017
  • James Careless

Un cabinet juridique bien Ă©tabli et ancrĂ© dans une tradition vestimentaire des plus rigoureuses peut ĂŞtre un lieu très intimidant pour les jeunes juristes dĂ©sinvoltes, particulièrement pour ceux qui sont habituĂ©s Ă  s’habiller comme ils veulent, Ă  exhiber leurs tatouages et leurs perçages corporels, et Ă  ne pas mâcher leurs mots. En fait, cela peut sembler un lieu de travail impossible Ă  intĂ©grer sans se dĂ©partir de ses propres attitudes et convictions afin de se fondre dans le moule.

Cette perception des cabinets juridiques est un peu vraie, mais n’est pourtant pas nĂ©cessaire. « Les jeunes juristes avisĂ©s peuvent très bien Ă©quilibrer la rĂ©ussite professionnelle et l’expression personnelle », a dĂ©clarĂ© Jordan Brown, jeune juriste dans le cabinet Cox & Palmer Ă  Charlottetown (ĂŽ.-P.-É.) et reprĂ©sentant Ă  l’assemblĂ©e lĂ©gislative provinciale dans le gouvernement libĂ©ral depuis 2015. « Le secret est de trouver le poste au sein du cabinet qui correspond le mieux Ă  votre style ou d’ouvrir votre propre cabinet oĂą vous pourrez dĂ©cider de tout. »

Et pourtant, les jeunes juristes ne trouveront probablement aucun cabinet qui encourage son personnel Ă  se vĂŞtir Ă  la mode punk rocker. « C’est parce que l’apparence d’un juriste doit correspondre Ă  la notion qu’ont les clients de ce qu’il devrait ĂŞtre, afin de leur inspirer confiance et de les voir revenir », a dĂ©clarĂ© Preston Parsons, jeune avocat dans le cabinet Overholt Law Ă  Vancouver (C.-B.). « Vous devez adapter votre apparence compte tenu de cela, tout comme le fait chacune des personnes qui travaillent dans votre cabinet, quel que soit son âge. »

Les cabinets dont le code vestimentaire est fondĂ© sur les attentes raisonnables de leurs clients, plutĂ´t que sur des concepts bornĂ©s quant Ă  l’apparence de leur personnel, peuvent offrir Ă  leurs juristes une grande souplesse quant Ă  leur apparence, y compris en acceptant les bijoux corporels Ă  condition qu’ils soient discrets et de bon goĂ»t, et mĂŞme les tatouages. Ce sont les possibles employeurs que les jeunes juristes prĂ©occupĂ©s par leur apparence pourraient souhaiter cibler en premier dans le cadre de leur recherche d’emploi.

« Je me souviens que j’ai assistĂ© Ă  une rencontre avec un client et que l’associĂ© pour lequel je travaillais a suggĂ©rĂ© que nous portions tous deux des vĂŞtements plus dĂ©contractĂ©s Ă©tant donnĂ© que la rĂ©union avait lieu sur un chantier », a dĂ©clarĂ© Vivene Salmon, jeune juriste d’entreprise. « Cela allait de soi. Mon conseil : faites comme votre supĂ©rieur ou vos collègues un peu plus chevronnĂ©s. »

Se doter d’une garde-robe professionnelle habillĂ©e, particulièrement une qui reflète un style personnel, peut Ă©galement s’avĂ©rer une dĂ©pense considĂ©rable pour les jeunes juristes. Cela fait des cabinets dont le code vestimentaire permet des vĂŞtements plus dĂ©contractĂ©s une option très tentante.

Preston Parsons se souvient d’avoir portĂ© des costumes pas toujours très flatteurs, ainsi que des vĂŞtements professionnels dĂ©contractĂ©s, qu’il avait portĂ©s Ă  la facultĂ© de droit, pendant ses premières annĂ©es d’exercice, car il n’avait pas les moyens financiers de mettre sa garde-robe Ă  jour rapidement. Il a commencĂ© Ă  porter des complets taillĂ©s sur mesure une fois que son salaire lui a permis de le faire. « Le fait de porter un costume taillĂ© sur mesure exprime ce que je suis tout en projetant une meilleure image de professionnalisme que si je m’habillais en prĂŞt-Ă -porter », a dĂ©clarĂ© Me Parsons. « Tout le monde y gagne, mais il a fallu du temps pour que je puisse me le permettre financièrement. »

Il ne fait aucun doute que la tenue professionnelle des femmes tend Ă  faire l’objet d’une attention beaucoup plus soutenue que celle des hommes, mĂŞme dans notre 21e siècle censĂ© avoir dĂ©passĂ© ce genre de distinction. En particulier, « je pense que les femmes sont jugĂ©es beaucoup plus sĂ©vèrement lorsqu’elles commettent une “erreur” dans leur choix vestimentaire », a affirmĂ© Me Salmon, mĂŞme si cette erreur ne relève que de l’opinion d’autrui.

Pour se procurer des conseils vestimentaires correspondant Ă  son propre style et lui donnant confiance en elle, Vivene Salmon se tient au courant des styles portĂ©s par les femmes influentes qu’elle respecte. « J’admire Theresa May, la première ministre du Royaume-Uni, Christine Lagarde, la directrice gĂ©nĂ©rale du FMI et Mellody Hobson, la prĂ©sidente d’Ariel Investments », a dĂ©clarĂ© Me Salmon. « Ce sont toutes des professionnelles très accomplies qui ont toujours une allure très professionnelle sans se dĂ©partir de leur sens du style et de leur individualitĂ©. »

Les vĂŞtements « diffĂ©rents » et les tatouages et bijoux corporels sont les Ă©lĂ©ments visuels qui peuvent dĂ©marquer les jeunes juristes. Les attitudes envers les relations interpersonnelles et le langage utilisĂ© peuvent Ă©galement causer des tensions avec leurs aĂ®nĂ©s au sein du cabinet.

« Mon père me disait toujours : “Tu as deux oreilles pour Ă©couter et une bouche pour parler, fais-en bon usage.” », a dĂ©clarĂ© Me Brown. « D’ailleurs, il est tout Ă  fait sensĂ© de bien Ă©couter avant de parler, quel que soit l’âge de votre interlocuteur. Et lorsque vous vous dĂ©cidez Ă  rĂ©pondre, faites montre de politesse et de respect, tout en Ă©tant direct. Cela convient gĂ©nĂ©ralement Ă  toute personne prĂŞte Ă  Ă©couter. »

Le langage utilisĂ© par les juristes est très rĂ©vĂ©lateur de leur professionnalisme, quel que soit leur âge. « Ma gĂ©nĂ©ration a l’habitude de parler très familièrement », a dĂ©clarĂ© Me Parsons. « L’entrĂ©e dans la profession juridique exige un style beaucoup plus raffinĂ© et prĂ©cis. Nous devons donc tenir compte de cette rĂ©alitĂ© dans notre discours si nous voulons ĂŞtre pris au sĂ©rieux. L’avantage, c’est qu’en apprenant Ă  s’exprimer comme le fait un juriste Ă©tabli vous permet de dire ce que vous voulez dire, tant que vous choisissez vos mots avec soin. »

MĂŞme le ton utilisĂ© par les jeunes juristes compte s’ils essaient d’ĂŞtre pris au sĂ©rieux par des collègues chevronnĂ©s. « L’un de mes mentors juridiques m’a dit un jour : “Vivene, vous ĂŞtre très intelligente, mais vous terminez toujours vos phrases en anglais par ‘like’ ou ‘you know’ et sur un ton interrogatif, comme si vous posiez une question alors que vous faites une affirmation” », a dĂ©clarĂ© Me Salmon. « Cela affaiblit l’impact de ce que vous dites. » Pour rĂ©gler ce problème sans compromettre sa capacitĂ© Ă  s’exprimer avec franchise, « j’ai suivi un cours de théâtre, qui s’est rĂ©vĂ©lĂ© un excellent outil pour m’aider Ă  amĂ©liorer ma capacitĂ© Ă  m’exprimer en public », a-t-elle dĂ©clarĂ©.

Ce que dĂ©clarent ces trois jeunes juristes prospères, qui siègent tous au ComitĂ© exĂ©cutif du Forum des jeunes avocats et avocates de l’ABC, prouve qu’il est possible pour les jeunes professionnels de s’intĂ©grer sans pour autant devoir renoncer Ă  eux-mĂŞmes. « Oui, il y a des cabinets juridiques qui n’aiment pas que leurs jeunes collaborateurs fassent montrent de trop d’individualitĂ© », a dĂ©clarĂ© Jordan Brown. « Mais rien ne vous oblige Ă  travailler pour eux, ou d’ailleurs pour qui que ce soit d’autre que vous-mĂŞme si c’est ce que vous prĂ©fĂ©rez. Après tout, votre carrière juridique est entre vos seules mains, quel que soit votre âge. Et vous pouvez choisir votre voie dès que vous commencez Ă  chercher votre premier emploi. »

James Careless écrit fréquemment pour EnPratique de l'ABC.

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