De bonnes compétences de négociation sont la clé du succès

  • 14 dĂ©cembre 2016
  • Carolynne Burkholder-James

Le Canada allant entrer en phase de nĂ©gociations au sujet du bois d’Ĺ“uvre et peut-ĂŞtre mĂŞme en ce qui concerne l’accord de libre-Ă©change avec les États-Unis, le concept de nĂ©gociation est, de nos jours, l’un des sujets frĂ©quemment abordĂ©s par la presse.

La nĂ©gociation est un outil important pour les juristes qui « se spĂ©cialisent dans le règlement de problèmes », dĂ©clare Leslie H. Macleod, mĂ©diatrice et spĂ©cialiste en rĂ©solution de conflits qui exerce Ă  Toronto.

« Certains pensent que la nĂ©gociation est très simple, car elle le semble lorsqu’elle est effectuĂ©e correctement », dit-elle. « Cependant, il s’agit d’une compĂ©tence très complexe, car elle est fondĂ©e, Ă  tout le moins, sur l’entregent, les compĂ©tences en matière de communication, d’analyse et de rĂ©flexion stratĂ©gique. »

ĂŠtre capable de nĂ©gocier efficacement peut ĂŞtre un Ă©lĂ©ment essentiel du succès d’un juriste, selon Me Macleod, qui exerce dans le cabinet Leslie H. Macleod & Associates et est professeure Ă  la facultĂ© de droit Osgoode Hall oĂą elle est codirectrice du programme de maĂ®trise en règlement des diffĂ©rends.

Jonathan Jacobs, un avocat de Toronto compĂ©tent dans les domaines du contentieux commercial international et du règlement des diffĂ©rends, est d’accord avec elle.

« Si un juriste ne peut pas nĂ©gocier avec confiance, je pense qu’il ne sera pas en mesure de reprĂ©senter au mieux les intĂ©rĂŞts de ses clients avec tout le zèle requis », affirme Me Jacobs, qui travaille en tant que mĂ©diateur et expert-conseil en nĂ©gociation. « Un avocat qui peut nĂ©gocier avec confiance peut tirer parti de la nĂ©gociation de façon Ă  rendre son service plus prĂ©cieux. »

Julie Macfarlane, professeure Ă  la facultĂ© de droit de l’universitĂ© de Windsor et experte en règlement des diffĂ©rends, en mĂ©diation et en pratique juridique, dit que 95 % des dossiers parviennent Ă  un règlement avant l’Ă©tape d’un procès en tant que tel.

« Depuis fort longtemps, la plupart des dossiers se rĂ©glaient, mais Ă  la toute dernière minute, sur les marches du palais de justice comme on dit », affirme-t-elle. « La plupart du temps, les juristes assument qu’ils doivent se prĂ©parer, prĂ©parer leur dossier et leur client en vue d’un procès, malgrĂ© le fait que les procès n’ont pratiquement jamais lieu. »

Me Macfarlane, dont une nouvelle Ă©dition de son ouvrage Ă  succès intitulĂ© The New Lawyer: How Settlement is Transforming the Practice of Law paraĂ®tra en 2017, affirme qu’elle trouve encourageant de voir que la nĂ©gociation devient un processus plus intentionnel pour les juristes.

« Les juristes commencent de plus en plus Ă  prĂ©parer leurs clients au fait qu’il est inĂ©vitable de parvenir Ă  un règlement beaucoup plus tĂ´t et c’est un bien meilleur moyen pour procurer un très bon rĂ©sultat au client », ajoute-t-elle.

Me Macfarlane, Me Macleod et Me Jacobs offrent les conseils suivants concernant la négociation.

Attendez que la question soit « mĂ»re »

Les nĂ©gociateurs chevronnĂ©s ou ceux qui travaillent dans le domaine de la diplomatie internationale parlent souvent du fait qu’une question est « mĂ»re », selon Me Macfarlane.

« Au fond, vous ne pouvez pas parvenir Ă  un règlement tant que les deux parties ne sont pas motivĂ©es. Sans motivation, c’est l’impasse pratiquement garantie », dit-elle. « La situation dans laquelle les deux parties ne trouvent que des dĂ©savantages, parfois appelĂ©e douloureuse impasse, est celle Ă  partir de laquelle le dossier commence Ă  ĂŞtre mĂ»r pour un règlement. »

Le nĂ©gociateur chevronnĂ© anticipe cette situation, affirme Me Macfarlane.

Mettez-vous Ă  leur place

Me Jacobs recommande aux avocats de « tenter de faire un pas vers l’autre partie en se mettant Ă  la place de cet avocat et en essayant de l’Ă©couter plus attentivement ».

« Vous pourriez ainsi rĂ©ussir Ă  faire d’autres progrès Ă  la lumière de votre nouvelle comprĂ©hension de leur point de vue au lieu de continuer Ă  rĂ©pĂ©ter le vĂ´tre, toujours identique Ă  lui-mĂŞme, ce qui ne vous mènera nulle part », dit-il.

Me Macfarlane est d’accord et recommande aux juristes de se poser les questions suivantes : « Qu’est-ce qui est important pour l’autre partie? Qu’est-ce qui va l’inciter Ă  parvenir Ă  un règlement? »

Lorsque les avocats se prĂ©parent en vue d’un procès ou d’un arbitrage, ils sont frĂ©quemment complètement centrĂ©s sur leurs arguments et leurs rĂ©futations, dit Me Macfarlane.

« Cependant, dans le domaine du contentieux, ils ne se mettent pas Ă  la place de la partie opposĂ©e. C’est un vĂ©ritable changement de la façon de penser. Je pense que nous commençons Ă  le constater », dit-elle.

Soyez créatif

Selon Me Macleod, les juristes crĂ©atifs peuvent aider leurs clients Ă  passer outre une « impasse imprĂ©vue. »

« Soyez habile Ă  analyser la situation avec objectivitĂ© et de façon constructive, et cherchez des moyens de passer au-delĂ  de l’impasse », recommande-t-elle.

Me Macleod suggère, parmi les exemples de solutions crĂ©atives, le fait de mettre certaines questions de cĂ´tĂ© pour y revenir plus tard, d’inviter d’autres experts Ă  la table des nĂ©gociations « pour Ă©tendre les connaissances et accroĂ®tre le degrĂ© d’expertise disponible », ou susciter une conversation plus approfondie pour mieux comprendre les intĂ©rĂŞts des parties et dĂ©couvrir diffĂ©rentes options de règlement.

Évitez les disputes

« MĂŞme si les avocats considèrent que l’Ă©change d’arguments fait partie de leur profession, essayez d’Ă©viter les disputes et de sans cesse vous efforcer de prouver que vous avez raison et qu’ils ont tort », recommande Me Jacobs.

Il conseille en outre aux juristes de « ne pas mordre Ă  l’hameçon ».

« Il est facile de se laisser tenter de toujours penser Ă  un contre-argument et de le rĂ©pĂ©ter. Cependant, si vous les attaquez en retour, les chances sont que vous allez tourner en rond et n’avancerez pas dans le règlement de votre litige », conseille Me Jacobs. « Sans compter que cela va aviver les tensions existantes ».

Il recommande de plutôt se distancer un peu du problème en faisant une pause ou en sortant faire une promenade.

« Prenez le temps de bien rĂ©flĂ©chir et penser Ă  ce que sont vos objectifs pour cette nĂ©gociation afin de pouvoir mieux vous concentrer au lieu de vous borner Ă  contre-attaquer », ajoute Me Jacobs.

Utilisez différentes techniques

Les juristes devraient comprendre la thĂ©orie de la nĂ©gociation et les diffĂ©rents modèles, tels que la nĂ©gociation compĂ©titive ou la nĂ©gociation coopĂ©rative, et se servir de ces techniques lorsqu’elles sont appropriĂ©es, dit Me Macleod.

« Sachez quand et comment utiliser chacun des modèles et soyez prĂŞt Ă  adapter votre style prĂ©fĂ©rĂ© aux caractĂ©ristiques propres de la nĂ©gociation en cours », conseille-t-elle.

Ainsi, si une juriste est coopĂ©rative par nature, mais fait face Ă  un juriste qui ne l’est pas, elle peut devoir « se forcer Ă  ĂŞtre compĂ©titive afin de servir au mieux son client », affirme Me Macleod. 

Soyez prĂŞt

« Je connais des gens qui pensent qu’il ne s’agit lĂ  que d’une nĂ©gociation et que point n’est besoin de s’y prĂ©parer. Je ne suis pas d’accord », dit Me Macleod.

Elle recommande de connaĂ®tre votre dossier « sur le bout des doigts » et d’apprendre Ă  connaĂ®tre la partie avec laquelle vous nĂ©gociez.

Avant la nĂ©gociation, les juristes devraient penser Ă  la position de leur client et Ă  ses intĂ©rĂŞts ainsi qu’Ă  ceux de l’autre partie, dĂ©clare Me Macleod.

« PrĂ©voyez aussi les difficultĂ©s, les impasses qui peuvent survenir et la façon de passer outre », dit-elle.

N’envenimez pas la situation

« MĂŞme si l’autre nĂ©gociateur campe sur ses positions et refuse de changer d’avis, vous ĂŞtes engagĂ© en qualitĂ© de nĂ©gociateur pour aider Ă  rĂ©gler un conflit, et non pour envenimer la situation en disant “eh bien, nous voici dans une impasse” ou en dĂ©cidant de camper sur vos propres positions », affirme Me Jacobs. « C’est dans ces cas-lĂ  que ces conflits perdent toute proportion et Ă©chappent Ă  tout contrĂ´le. »

Il recommande de plutĂ´t informer l’autre partie des consĂ©quences de son attitude pour elle et pour votre client si elles ne peuvent parvenir Ă  un règlement. 

Pour obtenir davantage de conseils sur la nĂ©gociation, veuillez consulter DĂ©nouer l’impasse : Reprendre les nĂ©gociations irrĂ©mĂ©diablement bloquĂ©es disponible, uniquement en anglais, sous forme de rediffusion dans le cadre de la sĂ©rie Solutions offerte par l’ABC.

Carolynne Burkholder est avocate dans le cabinet Heather Sadler Jenkins LLP Ă  Prince George (Colombie-Britannique) 

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