L’ABC comparaît devant le Comité spécial du Sénat sur le secteur de la bienfaisance

  • 28 janvier 2019

Quelle est la différence entre une fin de bienfaisance et une activité de bienfaisance?

Manifestement, une fin et une activitĂ© ne sont pas la mĂŞme chose. Cependant, en ce qui concerne le droit, cette diffĂ©rence revĂŞt une importance majeure, particulièrement lorsque ces expressions figurent dans un texte lĂ©gislatif qui contient la menace de la rĂ©vocation du statut d’organisme de bienfaisance.

C’est l’un des principaux arguments prĂ©sentĂ©s par Karen Cooper, avocate dans le cabinet Drache Aptowitzer, qui a comparu devant le ComitĂ© spĂ©cial du SĂ©nat sur le secteur de la bienfaisance en dĂ©cembre en qualitĂ© de reprĂ©sentante de la Section du droit des organismes de bienfaisance et Ă  but non lucratif de l’Association du Barreau canadien.

« Si je pouvais avoir une liste de souhaits, l’expression “activitĂ© de bienfaisance” serait supprimĂ©e complètement », a-t-elle dĂ©clarĂ© devant le ComitĂ©, affirmant que les gens « comprennent toujours mal » la diffĂ©rence.

Le ComitĂ© examine les façons de moderniser les règles qui rĂ©gissent les organismes de bienfaisance et Ă  but non lucratif. Comme l’a indiquĂ© la section dans une lettre adressĂ©e au ComitĂ©, elle a rĂ©digĂ© de nombreux mĂ©moires au cours de dernières annĂ©es pour traiter de la capacitĂ© de ce secteur Ă  rĂ©aliser des activitĂ©s de reprĂ©sentation et des activitĂ©s de nature politique.

Dans sa dĂ©claration devant le ComitĂ©, Me Cooper a soulignĂ© que la section appuie l’abrogation de la limite de 10 % imposĂ©e sur les activitĂ©s politiques tout en maintenant l’interdiction des activitĂ©s politiques partisanes, soit une portion du projet de loi C-86 qui a reçu la sanction royale en dĂ©cembre.

« Nous estimions que les propositions offriraient aux organismes de bienfaisance plus de libertĂ© pour mener des activitĂ©s politiques non partisanes, telles que la promotion des politiques publiques, et nous Ă©tions favorables Ă  toutes ces mesures », a-t-elle dit. Dans la dĂ©finition d’un organisme de bienfaisance, le projet de loi a toutefois maintenu un renvoi aux activitĂ©s de bienfaisance.

« D’après mon expĂ©rience, c’est l’une des phrases les plus surutilisĂ©es et incomprises dans la loi concernant la rĂ©glementation des organismes de bienfaisance. Ce libellĂ© a crĂ©Ă© beaucoup d’incertitude dans le passĂ© et perpĂ©tue de la confusion inutile concernant la distinction entre une fin et une activitĂ© qui afflige une grande partie des dĂ©clarations entourant les obligations relatives Ă  la conformitĂ© des organismes de bienfaisance. »

Me Cooper dit que la dĂ©finition d’un organisme de bienfaisance devrait reflĂ©ter celle d’une fondation de bienfaisance et ne faire aucun renvoi aux activitĂ©s de bienfaisance.

La section aimerait aussi que le renvoi Ă  « l’appui indirect » des partis politiques soit supprimĂ©, car il est Ă  la fois vague et subjectif. Elle a donnĂ© l’exemple d’un organisme de bienfaisance du domaine environnemental engagĂ©e dans un programme de sensibilisation du public Ă  l’Ă©gard des vĂ©hicules Ă©lectriques lorsqu’une campagne Ă©lectorale commence et que l’un des partis indique dans sa plateforme Ă©lectorale qu’il accordera un crĂ©dit sur les vĂ©hicules Ă©lectriques.

« Votre site web ne fait nullement mention d’un parti politique, ou d’un candidat, ou de quoi que ce soit, mais comme vous avez une position similaire Ă  ce qui se trouve dans la plateforme Ă©lectorale d’un parti, le mot indirect risque de faire en sorte que vous soyez perçu comme appuyant un parti ou un candidat, ou comme vous y opposant. »

« Soit dit en passant, c’est une des recommandations que nous faisons qui a des rĂ©percussions concrètes sur les conseils que je donne au quotidien dans des situations rĂ©elles. »

La sĂ©natrice Ratna Omidvar, vice-prĂ©sidente du ComitĂ©, a soulignĂ© qu’un grand nombre des tĂ©moins ont parlĂ© de « l’effet intimidant » suscitĂ© par la règle des 10 % dans le secteur Ă  l’Ă©gard des activitĂ©s politiques. Elle a demandĂ© Ă  Me Cooper et au tĂ©moin la prĂ©cĂ©dant, qui reprĂ©sentait l’organisme Canada sans pauvretĂ©, si l’Ă©limination de ce plafond ne se traduirait pas par une « cacophonie » oĂą toutes les parties du spectre politique feront entendre leurs points de vue.

Michèle Biss, de Canada sans pauvretĂ©, a soulignĂ© que cela ne changerait pas les règles rĂ©gissant la dĂ©termination des entitĂ©s qui peuvent devenir des organismes de bienfaisance. « Ce que cela change, c’est la capacitĂ© de nos organismes, souvent des organismes qui reprĂ©sentent les personnes marginalisĂ©es, de participer au discours sur les politiques publiques ».

Quant Ă  elle, Me Cooper a dĂ©clarĂ© qu’elle ne pouvait pas s’exprimer au nom de l’ABC sur ce point. Cependant, du point de vue professionnel, en sa qualitĂ© d’avocate qui a vĂ©cu l’effet intimidant, elle ne s’en inquiète pas.

« Les organismes de bienfaisance dans leur ensemble sont très conservateurs — avec un petit c — dans leur approche pour conserver leur statut de bienfaisance, si bien que je ne crains pas la cacophonie. »

Et d’ajouter : « Le plus grand dĂ©fi pour moi dans ma pratique consiste Ă  expliquer, parfois, l’incomprĂ©hensible Ă  quelqu’un qui veut respecter les règles. Je ne m’inquiète nullement d’une cacophonie ».

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